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Avoir le vertige avec Olivier Marguerit

Trois ans après Le Torrent, la boue, le voilà À Terre !, titre d’un deuxième album intime sorti en janvier 2019. O ou Olivier Marguerit y raconte ses vertiges, les affres de l’alcool, les soubresauts de l’amour. Bref, tout sa fragilité sans sombrer dans le pathos. A ces chansons, le multi instrumentiste qui a évolué avec Halo Maud, Syd Matters a créé un écrin pop, lumineux et harmonieux. Entretien avec Olivier Marguerit qui assure la première partie du concert de Papooz jeudi 2 mai au 106 à Rouen.

Que plaisir avez-vous à écrire tout seul ?

Ce sont des moments que j’aime beaucoup. Avant d’écrire, je compose. Je travaille sur la musique. Je fais le tour de mes envies. Je me fixe des cadres. Pour cette phase, je suis souvent au piano. C’est un travail de solitaire, un moment de recherche. En revanche, quand j’écris le texte, j’aime bien être entouré tout en étant seul au milieu du monde. J’aime bien écrire dans le métro parisien au milieu des passagers. Comme je parle beaucoup de moi, je me sens tout de même au monde. Je n’ai pas ce truc d’écrivain : me mettre à une table toute une journée.

Pourquoi avez-vous besoin de définir des cadres ? Est-ce rassurant pour vous ?

Oui, sûrement. Quand on est devant un champ des possibles infinis, on peut tout faire donc avoir peur de se perdre. Un cadre permet de fixer des limites, parfois d’en sortir pour mieux y revenir. On le sait : la liberté naît de la contrainte.

Dans le premier album, l’eau était très présente. Dans le second, c’est le vertige. Pourquoi ces thèmes ?

Ce sont des lignes que je me suis fixé. Il y avait l’eau, l’eau protectrice, le liquide amniotique. Pour ce nouvel album, j’ai souhaité aborder la hauteur, le saut, la chute. Des thématiques qui se sont en fait imposées. Quand j’ai commencé à penser à ce deuxième disque, j’ai eu peur de ne pas arriver à écrire. Je raconte ce sentiment de vertige. 

Est-ce que vous avez le vertige ?

J’ai le vertige depuis que je suis jeune. Comme la plupart des hommes de ma famille. Cela reflète la peur de sauter, la peur de la mort aussi. C’est une présence en soi, un regard sur le monde. Cela fait partie de moi, des personnes qui me sont proches. En fait, au début de l’histoire de ce deuxième album, je voulais parler de politique mais je n’arrivais pas à trouver des angles pertinents. C’est pour cette raison que je suis revenu à une écriture plus personnelle.

Et une écriture plus instinctive aussi ?

Pendant très longtemps, j’ai eu des gestes rapides, une impulsion. Je pensais que c’était très bien. Rétrospectivement, je me suis aperçu que c’était une erreur. J’aime écrire et laisser mûrir les choses. Avant qu’un texte et une musique deviennent un morceau, il se passe entre un et trois ans.

Vous avez évoqué des moments de recherche. Est-ce que l’écriture d’un deuxième album est davantage propice à cela ?

Pour le premier album, on entre dans des processus que l’on ne maîtrise pas toujours. Quand on écrit une première chanson, le disque n’existe pas encore. Tout se construit lentement. Pour le deuxième album, on part de rien ou de quasiment rien. Là, ce fut un tout autre travail que j’ai bien aimé. Il faut chercher. Justement pour À Terre !, j’avais envie de titres plus directs, plus simples, de pop songs. La première tournée m’a montré que les formes plus alambiquées faisaient que le public ne pouvaient pas participer. Moi qui viens du punk , cela m’a manqué. Je suis alors revenu à des formes plus simples et plus toniques.

Les odeurs et les éléments sont très présents. Pourquoi ?

Les odeurs doivent m’habiter. Même dans la relation intime. Quant aux éléments, ils sont en effet présents. D’ailleurs le vent me met toujours dans un inconfort. Je me sens violenté.

Êtes-vous un romantique ?

Oui, je suis un sentimental. J’aime cette chanson française écrit par Flavien Berger et Fránçois and The Atlas Montains.

Est-ce que la littérature vous influence ?

Je lis mais je ne sais pas si la littérature m’influence. Pour cet album, il y a eu beaucoup d’images mentales qui sont venues de films. Juste avant l’écriture, j’avais vu plusieurs films de Tarkovski dans un temps assez resserré. Je pense que cela a nourri À Terre !.

Infos pratiques

  • Jeudi 2 mai à 20 heures au 106 à Rouen.
  • Tarifs : de 20,50 à 11,50 €. Pour les étudiants : carte Culture.
  • Réservation au 02 32 10 88 60 ou sur www.le106.com
  • En première partie de Papooz