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Comédie musicale à Dieppe : Pierre Notte écrit quatre solitudes

cendresPierre Notte est un auteur protéiforme et un metteur en scène qui compte beaucoup au théâtre. Sa plume toujours alerte n’en est pas moins incisive pour raconter des histoires tragi-comiques. Sur Les Cendres en avant, une pièce de la compagnie Les Gens qui tombent créée mardi 23 et mercredi 24 février à la scène nationale de Dieppe, narre l’histoire de quatre femmes aux vies cabossées. Macha se prostitue pour vivre et élever sa petite sœur Nina. Rose qui habite dans l’appartement voisin a mis le feu. Le mur qui les séparait s’est effondré et toutes sont condamnées à vivre ensemble. A ce trio s’ajoute la femme d’un forain s’offrant le corps de Macha. Ces quatre femmes que tout oppose vont en fait décider de se construire une nouvelle vie. Et ce en chantant. Sur Les Cendres en avant est une comédie musicale. Entretien avec Pierre Notte.

 

Qu’aimez-vous dans les comédies musicales ? Est-ce le côté paillettes ?

Surtout pas le côté paillettes. Je n’aime pas ça. Néanmoins, il y a de la magie dans les comédies musicales qui travaillent à réenchanter le monde, à enjoliver la tragédie, à rassembler les gens. Pour cela, les comédies musicales me touchent, m’émeuvent, me bouleversent. Il y a une forme de grâce, de beauté.

 

Il y a très souvent des chansons dans vos créations. Est-ce que la comédie musicale s’est imposée lors de l’écriture ?

Elle s’est en effet imposée quand j’ai écrit les dialogues. J’ai toujours eu une écriture assez rythmée, musicale. Cette fois-ci, j’ai voulu aller plus loin. J’ai alors écrit des dialogues chantés. C’est toute la complexité du machin : ce n’est pas de la chanson mais je dois faire en sorte que tout soit mélodieux. Chaque projet est un défi que l’on s’impose. Dans la forme, cette pièce m’emmène à un autre endroit.

 

Avez-vous écrit texte et musique en même temps ou séparément ?

Cela s’est fait de manière concomitante. Cette création est basée sur le dialogue et aussi sur la musique avec des moments très rythmés et d’autres plus doux.

 

Quel plaisir avez-vous eu à écrire texte et musique ?

J’ai adoré ça. J’adore la composition de chansons, de musique. C’est l’exercice qui me rend le plus heureux. Quant à l’écriture théâtrale, j’en ai besoin.

 

Comment avez-vous travaillé la mise en scène ?

J’ai dû imaginer un dispositif précis. Je savais que les mouvements seraient lents pour que les comédiennes puissent chanter et jouer. Trouver cet endroit où on chante et où on joue est très compliqué. Il y a ainsi un travail sur le corps qui est intense. J’ai aussi ajouté une voix, celle de Nicole Croisille, pour raconter ce que l’on ne peut pas voir.

 

 

Pourquoi les personnages de Sur Les Cendres en avant sont exclusivement féminins ?

J’avais envie de travailler avec ces quatre comédiennes (Julie Coulon, Blanche Leleu, Chloé Olivères, Elsa Rozenknop, ndlr). Par ailleurs, cela fait vingt ans que j’entends les femmes se plaindre d’un monde de théâtre écrit pour les hommes. Et dans ce monde-là, elles ne trouvent pas leur place. Dans cette pièce, ces quatre femmes vivent des tragédies personnelles. Elles vont se rencontrer de manière fortuite. Et c’est ensemble qu’elles sont se sortir de leur catastrophe. Ce sont des femmes qui ont décidé de se passer des hommes. Pour elle, c’en est terminé de l’homme providentiel, du père… Parce qu’elles ont toutes été plantées, mal traitées par des types.

 

Elles vivent dans un monde sans pitié.

Oui, c’est un monde de catastrophes. Ces individus vont essayer de se réparer par l’autre, avec l’autre, dans l’inconnu, donc de se reconstruire. On est dans un monde en construction. Mais un monde dans lequel on doit vivre ensemble. J’avais la volonté de raconter une obsession : on a aucune raison de supporter son voisin, l’autre qui est fait pour que l’on s’entretue et non pour l’on construisent de l’harmonie, du bonheur. J’ai alors joué à donner une vision plus positive. Quand on va au théâtre, chacun arrive avec son histoire, ses références, son vécu et vient partager un moment. Nous avons envie de raconter des aventures humaines dans lesquelles il est possible de vivre ensemble. Et nous avons envie d’y croire. Quelles que soit les différences, les oppositions.

 

  • Mardi 23 et mercredi 24 février à 20 heures au Drakkar à Neuville-lès-Dieppe. Tarifs : de 22 à 7 €. Réservation au 02 35 82 04 43 ou sur www.dsn.asso.fr