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Concert à Rouen : sauvages, Le Butcherettes

Le Butcherettes Photo 2015-6Cette jeune femme est un véritable tourbillon. Teri Gender Bender, chanteuse et guitariste mexicaine, a un regard franc, une énergie débordante et n’a pas la langue dans sa poche. Artiste engagée, audacieuse, elle offre sur scène des performances sauvages avec Le Butcherettes. Le trio de rock garage joue dimanche 15 novembre au Kalif à Rouen. Interview avec Teri Gender Bender qui a beaucoup observé et prend son temps pour exprimer ses idées.

 

 

 

Comment le Mexique influence encore votre musique aujourd’hui ?

Le Mexique a toujours eu une influence directe sur ma poésie et ma musique depuis que je suis très jeune. Quand j’étais petite et je restais chez mes grands-parents à Mexico, je m’asseyais à côté de mon Grand-Papa à regarder les films de série noire. J’ai été largement influencée et impressionnée par María Félix, Dolores del Río, Andrea Palma, des réalisateurs mexicains comme Emilio Fernandez, Bracho ou Galvadòn… L’âge d’or du cinéma noir mexicain correspond au moment où le Mexique essayait de tracer un chemin vers une modernité surréaliste en intégrant des cultures étrangères (Espagne, Allemagne, France, Amérique et aussi Afrique. Le Mexique est un véritable melting-pot mais son histoire est marquée par le déversement de beaucoup de sang. Chaque domaine a un passé et cela a toujours été ma fierté et ma joie d’être baignée de culture mexicaine. Curieusement, j’ai toujours eu honte d’avoir des racines de Cantabrie. Lors d’une récente tournée, je suis allée à Santander et 23 membres de ma famille m’ont fait la surprise d’assister à un concert. Cela m’a ouvert une porte vers une autre culture encore. Ce qui explique beaucoup de choses sur la dualité de ma personnalité. Je peux être calme et devenir rapidement irritable jusqu’à ressembler à un cheval qui montre ses dents. Le Mexique est aussi baigné de musiques comme le rap, le folklore, le blues, le RNB, les musiques classiques et électroniques, la soul… Le Mexique est un des pays les plus surréalistes qui possède une riche culture grâce à une dynamique artistique et est meurtri par une folle histoire.

 

Est-ce davantage l’histoire ou la vie d’aujourd’hui qui marquent votre travail ?

Les deux. Parce que le présent est très lié à ce passé. C’est aussi inscrit dans une partie inconsciente de mon cerveau. Cela apparaît seulement dans mes rêves. Mes parents étaient des personnes très passionnées. Ils lisaient à mes frères et moi Aristote, Plath. Ils discutaient ouvertement de politique devant nous. Je me souviens avoir vu mon père déçu par les Etats-Unis parce que ce pays était en train de perdre toutes les valeurs qui faisaient toute sa grandeur. Le racisme, les idées réactionnaires étaient des obstacles, des adversaires forts pour mes parents qui faisaient tout pour nous transmettre de belles valeurs.

 

Du Mexique, on parle beaucoup de l’extrême violence et du poids de la religion. Quel est votre sentiment sur ces sujets ?

Grâce à mes parents, j’ai toujours grandi avec l’idée que les personnes pauvres ont un riche sens du bonheur. Tôt ou tard, elles gagnent parce qu’elles travaillent dur pour vivre et apprécient la plus petite chose dans leur vie. A Guadalajara, il y avait beaucoup de violence, j’ai dû construire une forte personnalité pour me préserver. Là-bas, tu apprends juste en observant. Il y a tellement à voir. La violence fait partie du quotidien. Comme les lumières et la bonté. Etrangement, on balance entre les deux extrêmes. La religion est essentielle pour les personnes les plus pauvres et de la classe moyenne parce qu’elles perçoivent une vérité. Comme au football. C’est plein de symboles. Une équipe, une religion, une couleur… Tout cela donne un sens à leur vie. Je n’approuve pas du tout cela. Je suis très religieuse. Dieu est autour de nous et me donne de la force. J’ai ressenti que des jeunes aspiraient à dédier leur vie à l’église. C’est lié à leur famille et aux traditions. Dans cela, il y a le bon côté des choses et aussi le côté le plus sombre. Certains utilisent la religion pour leur propagande politique.

 

Quelle est la place pour l’amour dans cette vie ?

La place de l’amour dans cette vie pour moi est un lit chaud. Je dors dans différents endroits. Il n’y a rien de mieux que de dormir dans une chambre propre et dans un lit chaud.

 

 

 

 

 

Qu’est-ce qui vous a amené vers le rock garage ?

Une faim animale à l’intérieur de moi. J’ai ressenti la nécessité de faire exploser cette chose que j’avais en moi.

 

Pourquoi le nouvel album, A Raw Youth, est une ode à la rébellion ?

Nous sommes ici parce que d’autres personnes ont mené ardemment des batailles. Parfois, nous oublions cela. Cet album est un cri contre des zombies ! Levez-vous ! Arrêtez d’essayer de vous fondre dans des moules qui ont été conçus pour vous ! Regarder à l’extérieur de cette boîte et trouvez vous ! Parlez moins et faites plus. Cela donne du courage. J’ai toujours voulu être pleine de courage et d’avoir la puissance d’un cheval.

 

Dans cet album, votre voix a plusieurs couleurs. Pourquoi ?

Dans cet album, mon principal objectif a été de chanter avec mon cœur, de partager la vérité de chaque chanson, de servir un propos. Ma voix devait être aussi brut et aussi étrange que possible. D’où cette impression d’un ton différent, d’un personnage différent sur tous les titres.

 

  • Dimanche 15 novembre à 18h30 (début des concerts) au Kalif à Rouen. Tarifs : 8 €, 6 €. Réservation sur www.lekalif.com
  • Première partie : Mexican Six Shooter