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Geoffroy de Pennart : « Je fais partie des gens à qui il faut raconter des histoires »

Dans l’univers de Geoffroy de Pennart, il y a des loups, Georges, Sophie, la vache musicienne, et aussi des princesses, des dragons, des cochons… Tout un petit monde qui cohabite avec plus ou moins de bonne volonté. Cet auteur et illustrateur, surtout connu après la sortie du Loup est revenu, sera au festival Rouen Normandie du livre de jeunesse du 30 novembre au 2 décembre à la Halle aux Toiles à Rouen. Dans ses histoires, Geoffroy de Pennart prend beaucoup de plaisir à bousculer la vie des personnages des contes traditionnels. Il y ajoute beaucoup de tendresse et une sacrée dose d’humour. Entretien.

Les histoires, vous préférez les écouter ou les raconter ?

J’ai du mal à répondre à cette question. J’adore écouter les histoires. J’adore aussi les raconter. Peut-être que j’aime raconter parce que j’ai beaucoup écouté d’histoires. Je pense que les deux sont liés.

Est-ce que certaines histoires vous ont davantage marqué que d’autres ?

C’est très loin maintenant. Je fais partie des gens à qui il faut raconter des histoires. J’ai une vague théorie là-dessus. Pour apprendre ou comprendre les choses, certains ont besoin de vagues explications, d’autres des histoires. Par exemple, l’école est faite pour les enfants qui écoutent les explications. Comment faire pour les autres qui fonctionnent autrement ? Je pense que l’on ne s’adresse pas assez au côté imaginaire. J’ai davantage appris sur la vie dans les romans. Quand on me dit : je vais t’expliquer, mon cerveau se ferme. Je préfère que l’on me dise : je vais te raconter une histoire. Je ne pense pas être une exception.

Faut-il, selon vous, toujours narrer les contes traditionnels ?

J’ai été bercé aux contes et je pense que, oui, cela reste important. Les contes font appel à tout ce qui nous forge à la relation entre les hommes. Ils évoquent la peur d’aimer, d’être mal aimé ou de ne pas être aimé… Ce sont les sentiments au sens larges qui sont abordés dans ces histoires traditionnelles.

La peur est également un sentiment dont vous parlez souvent.

Oui et je l’aborde de manière plus contemporaine. Comme d’autres thèmes qui me tiennent à cœur. Dans les contes traditionnels, les filles ne doivent pas prendre d’initiatives. Elles sont passives, subissent. Au mieux, elles s’en sortent avec un prince charmant. Je me bats contre cela.

Devenir indépendant, autonome, libre est presque un leitmotiv dans vos histoires.

Oui c’est en cela que j’espère avoir une petite utilité. Cela m’amuse beaucoup de raconter des histoires, d’écrire des livres un peu rigolos. C’est important que les enfants apprennent en même temps, que les filles peuvent se permettre de prendre des initiatives et réussissent. Parvenir à cela reste ma fierté.

Et vous le prônez toujours avec humour.

Probablement parce que j’ai de l’humour mais je me cherche pas à être drôle. C’est ma nature. C’est mon ton. Quand j’ai une bonne histoire, je cherche avant tout à la raconter de manière efficace.

Pourquoi les loups sont-ils si présents dans vos livres ?

Le loup est un vecteur formidable, le personnage idéal pour raconter des histoires. Dans un récit avec un loup et un cochon, il n’y a pas besoin de beaucoup d’explications, on sait qu’un problème va survenir. Dans le langage populaire, ne dit-on pas quand il y a un problème qu’il y a un loup. Donc qui dit loup, dit problème. Et qui dit problème, dit histoire.

Vos dessins fourmillent de plusieurs objets quelque peu rétros. Pourquoi ?

Je suis né en 1951. Je dessine les objets de mon époque et je connecte mon enfance à ceux qui lisent mes histoires.

Pour raconter des histoires pour enfants, faut-il garder une part d’enfance ou prendre beaucoup de recul ?

C’est une question compliquée. Je pense qu’il faut les deux. Rester fidèle est important. Une de mes forces est d’avoir gardé les souvenirs de ce que je ressentais quand je lisais des histoires. Par exemple, il y a une chose qui m’énervait. Pourquoi le Petit Chaperon rouge ne reconnaît pas sa grand-mère ? C’est absurde. Je me disais : elle était complètement miraud celle-là. Quand j’ai revisité ce conte, je me suis bien gardé de revenir sur cette partie de l’histoire. Il faut donc rester un enfant et prendre du recul sur les choses. Sinon, les histoires ne sont pas suffisamment construites.

En tant que dessinateur avant tout, est-ce que l’image est au service de l’histoire ou l’inverse ?

Oui, le dessin est au service du texte. Cela a été une révélation pour moi. Je suis devenu auteur sur l’injonction d’une éditrice alors que j’avais plus de 40 ans. L’histoire prime de loin sur l’image. Il vaut mieux avoir une bonne histoire avec de mauvais dessins parce qu’il est possible de refaire. Cela a été difficile à admettre en tant qu’illustrateur.

 

Infos pratiques

  • Vendredi 30 novembre et samedi 1er décembre de 10 heures à 20 heures, dimanche 2 décembre de 10 heures à 18 heures à la Halle aux Toiles à Rouen. Tarif : 2,50 €, gratuit pour les moins de 18 ans, les étudiants, les bénéficiaires des minima sociaux, les familles nombreuses, les groupes venants avec une association ou une structure sociale.
  • Réservations pour les animations au 02 35 70 38 37, à animation@festival-livre-rouen.fr ou sur place
  • Programme complet sur www.festival-livre-rouen.fr
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