18 heures de théâtre avec « Henry VI »

photo : Nicolas Joubard

C’est un moment que les fous de théâtre attendent depuis le début de la saison. La Piccola Familia joue samedi 20 juin au Théâtre des Arts à Rouen Henry VI, l’intégralité du texte de Shakespeare. Une pièce de 18 heures pour laquelle Thomas Jolly, fondateur de la compagnie rouennaise et metteur en scène, a reçu un Molière en avril dernier. Une pièce, créée au festival d’Avignon, qui peut donner le vertige avec ses 15 actes, 150 personnages et 10 000 vers et qui a demandé cinq ans de travail à la Piccola Familia. Interview avec Thomas Jolly.


Un an après la création de Henry VI, considérez-vous que cette aventure théâtrale est une folle idée ?
Ah oui parce qu’il est impossible d’installer une habitude, un confort. A chaque fois que nous mettons en place la pièce, c’est un défi. C’est aussi une folle idée parce que nous ne maîtrisons pas tout. Ce spectacle est fait de l’ADN du théâtre, l’ici et le maintenant. C’est une tentative unique.

Henry VI a tourné pendant toute cette saison. Quelle place avez-vous aujourd’hui lors des représentations ?
Je suis le garant de la bonne conduite du spectacle. Je suis comme un entraineur d’une équipe de foot. J’interviens, je réajuste à chaque entracte.

Que réajustez-vous ?
C’est une question d’énergie, de rythme. 21 personnes sont sur scène. Toutes doivent être au diapason. Je suis comme un accordeur.

Comment vivez-vous ces moments entre le fait d’être à la fois un metteur en scène et un acteur ?
C’est un moment particulier. Dans ma vie, la question de l’acteur est importante. Il y a toujours eu une espèce de conflit entre le metteur en scène et l’acteur que je suis. L’acteur reste derrière le metteur en scène. En fait, j’ai construit un objet et je me glisse de dedans.

Dans Henry VI, vous jouez le futur Richard III. Pourquoi ce rôle ?
C’est le rôle dont je rêve depuis que j’ai 14 ans. Ce personnage me fascine. Il a un destin incroyable. Il est né en pleine guerre. Il est différent, difforme et il se construit un chemin qui lui permet d’accéder à la plus haute fonction. Dans Henry VI, on voit cette transformation. Il est tout d’abord un garçon jovial, convivial, sympa, puis décide de s’extraire du monde. Il n’est plus qu’un monstre physiquement. C’est passionnant.

Richard III sera donc la prochaine création de la Piccola Familia.
Dès le début du travail sur Henry VI, j’ai eu envie de mettre en scène Richard III. Le travail était tel que j’ai mis cela de côté. Aujourd’hui, j’ai besoin de conclure cette saga. Il y a six mois, nous avons entamé le travail de préparation.

La Piccola Familia joue à Rouen. Est-ce que ce sera un moment particulier pour la compagnie ?
C’est d’autant plus joli que nous pouvons jouer grâce à une fédération de lieux. Sinon, c’était impossible. Le passage à Rouen nous manquait. Nous avons présenté les premières heures de Henry VI ici en février 2010. Il y a eu d’autres représentations en 2012. Depuis, les Normands n’ont plus rien vu. J’imagine l’impatience qui doit être aussi intense que la mienne.

La distribution

Avec Johann Abiola, Damien Avice, Bruno Bayeux, Nathan Bernat, Geoffrey Carey, Gilles Charbier, Eric Challier, Alexandre Dain, Flora Diguet, Emeline Frémont, Damien Gabriac, Thomas Germaine, Thomas Jolly, Pier Lamandé, Martin Legros, Julie Lerat-Gersant, Charline, Porrone, Jean-Marc Talbot, Manon Thorel

Quinze structures régionales

Programmer l’intégralité de Henry VI au Théâtre des Arts à Rouen a été possible grâce à la collaboration de quinze structures théâtrales de Haute-Normandie. Pour David Bobée, directeur du centre dramatique national de Haute-Normandie, « c’est une fête du théâtre. Nous montrons comment la culture doit vivre sur un territoire. Nous devons être en dialogue avec les autres ».

Nicolas Mayer-Rossignol, président de la Région Haute-Normandie a salué le travail de la Piccola Familia et aussi celui des théâtres. « C’est une force pour nous d’avoir des artistes, des compagnies, des lieux, un environnement de femmes et d’hommes qui s’impliquent pour faire vivre la culture. Il faut que la Normandie soit une terre de culture ».

Infos pratiques

  • Samedi 20 juin à 10 heures au Théâtre des Arts à Rouen
  • photo : Nicolas Joubard