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« Une liberté qui manque »

photo Bruno Geslin
photo Bruno Geslin

Flesh, Trash, Heat, trois films sortis respectivement en 1968, 1970 et 1972 et produits par Andy Warhol. Paul Morrissey y raconte le milieu underground new-yorkais, la vie dans la Factory, lieu de production du mouvement pop-art, et parle de liberté. Pierre Maillet, metteur en scène au sein des Lucioles, adapte cette trilogie cinématographique au théâtre. La première partie Flesh/Trash est présentée mercredi 27 et jeudi 28 novembre Flesh/Trash au théâtre de La Foudre à Petit-Quevilly. Heat sera créé en février 2014.

 

 

 

Un lien fort avec le cinéma

C’est le cinéma qui a donné envie à Pierre Maillet de devenir comédien. « J’ai grandi dans une petite ville où il n’y avait pas de théâtre. Le cinéma était alors important. C’est tout mon imaginaire ». Le cinéma de Pierre Maillet, c’est celui de Pasolini et de Fassbinder, « des cinéastes auteurs. Je suis très sensible à ces gens qui ont la double casquette. Ils font des films où ils mettent en scène ». Dans Flesh/Trash, Pierre Maillet fait l’inverse : il réalise un théâtre cinématographique.

 

Les années 1960 et 1970

« Je suis un enfant de ces années-là ». Sans avoir de nostalgie, Pierre Mailler est attaché à ces années 1960 et 1970. « Il y avait des idéaux, des utopies, des batailles très fortes, une découverte de ce sentiment de liberté. Des portes ont été ouvertes dans le domaine artistique. Il y avait des grands questionnements sur la vie, sur la société… Ce sont des années très riches qui m’apportent encore beaucoup aujourd’hui. Nous ne sommes pas sortis de toutes ces interrogations qui sont toujours actuelles. Il est important d’y revenir ».

 

Le cinéma de Paul Morrissey

Pierre Maillet a découvert le cinéma de Morrissey au Chili. « C’était dans un village à trois-quarts d’heure de Santiago. J’ai vu par hasard que Flesh était projeté dans un ciné-club, très familial. Je me suis dit : allons-y. Ce fut une entrée très inattendue dans ces films et cela m’en a donné une vision très belle ».

Le metteur en scène a poursuivi l’exploration du cinéma de Morrissey il y a dix ans lors de la sortie des films dans un coffret. Pour Pierre Maillet, « ils offrent un regard qui peut changer la façon de voir les choses. Ces films montrent une liberté qui manque aujourd’hui, une humanité chez tous ces gens. C’est aussi une critique sur un mode de vie avec les ravages de la drogue. Même si les scènes sont sombres, on voit des personnes qui sont à fond dans la vie. Morrissey montre cette liberté avec tout ce qu’elle a de positif et aussi avec tout qu’elle peut entraîner. Aux spectateurs de faire la part des choses ».

 

 

Du cinéma au théâtre

Très vite, Pierre Maillet a l’idée de porter au théâtre les trois films de Morrissey. En regardant Flesh, Trash et Heat, il trouve « une matière à jouer. Il y a aussi une immédiateté. Et le théâtre peut cela ».

Dans cette mise en scène, Pierre Maillet se concentre sur la figure de Joe, porté par Joe Dallesandro, personnage central des trois films de Morrissey, et il en fait trois Joe, le prostitué de Flesh, le toxicomane de Trash et l’enfant star de Heat, interprétés par Denis Lejeune, Matthieu Cruciani et Clément Sibony. Trois personnages qui dressent en fait le portrait de cette famille de la Factory. Autour d’eux gravitent des êtres de passage.

Quand il a commencé le travail sur le plateau, Pierre Maillet avait « seulement structuré les scènes. Il n’y avait pas de texte. On n’était pas en improvisation totale non plus. J’ai laissé les acteurs libres à l’intérieur des scènes. J’ai privilégié ce qui se passait entre eux afin de rendre la chose la plus réelle. Cette fragilité de l’instant est très belle ».