Martin Zimmermann s’amuse avec les codes du clown dans Eins Zwei Drei, une création dans laquelle trois personnages loufoques se retrouvent dans un musée imaginaire aux règles bien établies. Le metteur en scène et chorégraphe suisse aborde dans ce théâtre sans parole et sans frontière la question complexe des relations humaines, les jeux de pouvoir. Eins Zwei Drei est à voir mardi 29 et mercredi 30 janvier au Volcan au Havre. Entretien avec Martin Zimmermann.
Que représente pour vous la figure du clown ?
C’est une question complexe. Depuis mon enfance, j’aime le clown. C’est un personnage intrigant qui peut faire rire et pleurer, faire peur aussi. En fait, toutes les émotions surgissent de ce personnage qui cherche avant tout la liberté parce qu’il en a besoin. Le clown est naïf, très humain. Il n’est pas un acteur. Il est une silhouette qui raconte. C’est lui, l’histoire.
Il ne joue jamais de rôle ?
Le clown est toujours dans le présent. Donc, non, il ne joue pas de rôle. Comme j’ai dit, l’histoire, c’est lui. Sa façon de marcher, de bouger raconte déjà une histoire. Il y a une réelle beauté à être maladroit. C’est important de rester soi-même tout en évoluant au milieu des autres. Un être humain peut se construire jusqu’au 5 ou 7 ans. Après, il essaie de comprendre comment il peut avancer, trouver sa place avec ses qualités, les outils qu’on lui a inculqués.
Qui sont, pour vous, les grands clowns ?
On les a oubliés, les grands clowns. Il y a Charlie Chaplin, Buster Keaton… Ils sont à la fois puissants et fragiles. Comme tous les hommes. Ils ont un savoir-faire incroyable. Ils savent tout faire. Dans Eins Zwei Rei, j’ai voulu raconter quelque chose d’aujourd’hui avec la tradition du clown.
Dans ce spectacle, vous réunissez un trio de clown.
Un trio de clown, c’est déjà une grande histoire parce que les trois personnages sont une société réduite. On retrouve le clown blanc qui représente la bourgeoisie riche, la classe qui sait tout. Il est le directeur d’un musée ultramoderne où il impose des règles, des façons de se comporter, où il ne peut y avoir d’émotion. Il n’y a donc plus de place pour l’humain. À côté de lui, il y a l’Auguste, le technicien de ce musée qui est soumis à son directeur. J’ai voulu une alchimie entre ces deux personnages parce qu’ils ont besoin l’un de l’autre pour exister.
Vous y ajoutez à ce duo un troisième personnage rare, le contre-pitre.
C’est Fratellini qui a inventé ce personnage. Il représente l’animal, l’enfant, la chose incontrôlable, l’émotion absolue. Il déstabilise l’Auguste et le clown blanc par sa façon de se comporter. Il les dérange, les contraint à se remettre en cause. Comme il exprime ce qu’il ressent à l’intérieur de lui, il est le symbole de la liberté. Les règles imposées vont alors exploser et le musée, tomber en ruine.
Que symbolise ce musée ?
Le musée est un prétexte pour raconter le monde moderne. C’est intéressant de voir comment la société est construire aujourd’hui. J’adore observer les gens. Je trouve cela fascinant. Le clown blanc a le pouvoir. Il est sur son piédestal, dans sa bulle et s’impose. Le contre-pitre est l’artiste qui est là pour déranger. Il est le fou, le punk.
Infos pratiques
- Mardi 29 janvier à 20h30, mercredi 30 janvier à 19h30 au Volcan au Havre.
- Spectacle tout public à partir de 12 ans
- Tarifs : de 24 à 5 €. Pour les étudiants : carte Culture.
- Réservation au 02 35 19 10 20 ou sur www.levolcan.com