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Pierre Hantaï : « Le temps qui passe vous incite à porter un regard différent sur la musique »

Le festival de musique ancienne se termine par un regard sur l’Angleterre de la fin du XVIe siècle au début du XVIIe siècle. Un regard porté par Pierre Hantaï, claviériste virtuose qui a collaboré avec Jordi Savall et le Poème harmonique. Pour ce concert de clôture samedi 24 août à Arques-la-Bataille, il est seul sur un clavecin italien pour interpréter des danses de William Byrd (1543-1623), John Redford (1486-1547), Orlando Gibbons (1583-1625), John Bull (1562-1628) qui font partie des Virginalistes anglais, des protégés de la reine Elisabeth Ire. Entretien avec Pierre Hantaï.

Quelles est la caractéristique de cette école des Virginalistes ?

Les Anglais sont des personnes très, très organisées qui aiment respecter les codes. Ils vont explorer divers genres de musique, des polyphonies, des danses principalement, comme des pavanes et des gaillardes. Il y a aussi des chansons, basées sur des chants qui peuvent être populaires. Chez les Anglais, il n’y a pas de séparation entre la musique savante et la musique populaire. Ce sont des chansons d’amour, des textes évoquant les métiers de l’époque sur des mélodies simples. Certaines sont nobles et graves, d’autres, plus enjouées.

Qu’aimez-vous dans ce répertoire ?

Ce répertoire a une couleur particulière à cette période en Angleterre. J’aime cette époque de la fin de la Renaissance. Après les Anglais vont se rapprocher de la musique française et italienne. Là, ils sont dans un cadre. Leur audace est autre. Les compositeurs se montrent cependant très inventifs dans ces formes simples. Leur univers est basé sur des variations. Chaque partie est répétée de manière ornée.

Quel est le fil rouge de ce programme sur les Virginalistes anglais ?

J’aime proposer des programmes qui soit varié, qui présente une période, un style musical. Les pièces s’enchaînent en montrant tous les aspects de ce style. Ces compositeurs font partis des premiers à éditer leur musique. Beaucoup étaient en lien. William Byrd est certainement le plus connu et le plus grand. Il est une espèce de Bach anglais, un très grand polyphoniste. John Bull est aussi un immense compositeur, plus fantaisiste. On sent une véritable unité.

Vous avez beaucoup joué ce répertoire. Avec quel esprit y revenez-vous ?

Oui, je l’ai beaucoup joué et je n’en ai pas encore fait le tour. D’ailleurs, on ne le peut pas. Le temps qui passe vous incite à porter un regard différent sur la musique. C’est l’essence de notre métier. À chaque fois, il est important d’oublier ce que l’on sait et de reprendre avec des yeux neufs. Tout oublier, c’est un état d’esprit. Il faut se rendre compte que l’on ne sait rien. Il ne faut pas avoir de certitude et il est nécessaire d’être conscient de cela. Il faut imaginer l’imaginable.

Vous allez jouer sur un clavecin italien de Philippe Humeau. Pourquoi avez-vous choisi cet instrument ?

C’est l’instrument assez idéal. Mon choix s’est porté sur une esthétique italienne du XVIIe siècle qui va bien fonctionner avec ce répertoire.

Infos pratiques

  • Samedi 24 août à 22 heures à l’église Notre-Dame à Arques-la-Bataille.
  • Tarifs : 20 €, 10 €, gratuit pour les moins de 18 ans.
  • Réservation au 02 35 04 21 03 ou sur www.academie-bach.fr
  • Programme complet du festival de musique ancienne sur www.academie-bach.fr