Rencontre au Havre : Catherine Poulain à la Galerne

photo Geoffroy Mathieu

Catherine Poulain est l’invitée de La Galerne au Havre mardi 26 avril pour son livre Le Grand Marin (Ed. de l’Olivier), un roman sélectionné par le prix Goncourt du premier roman et le prix Inter, tous deux prochainement décernés…

 

photo Geoffroy Mathieu
photo Geoffroy Mathieu

« Homme libre, toujours tu chériras la mer ! » Autre conseil – qui n’est pas de Baudelaire – « Lecteur, tu penseras bien à t’accrocher au bastingage ! » Du moins, si tu veux embarquer avec Catherine Poulain. Et laisse ton huile solaire… Nous sommes en Alaska, du côté de l’île Kodiak – 6 334 âmes – et on ne va pas en mer pour se promener façon catamaran aux Caraïbes. Ici, on prend la mer pour gagner sa croûte.

 

C’est dur. Encore plus dur pour une femme, serait-on tenté de dire ; sauf que « Lili » refuse un traitement différent au milieu de ces hommes. C’est une autre femme qui lui parle : « Tu dois bien le savoir, l’important, c’est pas la grosseur des muscles. L’important, c’est de tenir bon, regarder, observer, de se souvenir, d’avoir de la jugeotte. Ne jamais lâcher. Jamais te laisser démonter par les coups de gueule des hommes. Tu peux tout faire. L’oublie pas. N’abandonne jamais. » Elle se bat. En silence. Jusqu’à la mort, s’il le fallait. Car la mort peut frapper à la coque à tout moment. La douleur, à chaque instant. Entre le froid glaçant et les efforts ingrats en passant par les blessures, rien ne lui est épargné.

 

La petite Française a délibérément quitté son pays pour venir se perdre au bout du monde, dans une région inhospitalière qui ne fait généralement pas de cadeau. Ou plutôt si : l’Alaska va lui faire le cadeau d’une parenthèse de fraternité. Voire plus. Car dans cet environnement hostile, les hommes ne sont pas de rustiques sauvages. Il y a du souffle dans ce récit, ça bourlingue et on sert les dents. « Et l’on est retournés sur le pont. Je voulais être avec eux toujours, que l’on ait froid, faim et sommeil ensemble. Je voulais être un vrai pêcheur. Je voulais être avec eux toujours. Je ne veux pas rentrer. Je ne veux pas que ça finisse. »

 

L’auteure sait de quoi elle parle : la dame a vraiment pêché en Alaska pendant 10 ans sur un bateau qui doit ressembler au Rebel du livre, ce navire qui aimante Lili. « Embarquer, c’est comme épouser le bateau le temps que tu vas bosser pour lui. T’as plus de vie, t’as plus rien à toi. Tu dois obéissance au skipper. Même si c’est un con – il soupire. Je ne sais pas pourquoi j’y suis venu, il dit encore en hochant la tête, je ne sais pas ce qui fait que l’on veuille tant souffrir, pour rien au fond. Manquer de tout, de sommeil, de chaleur, d’amour aussi, il ajoute à mi-voix, jusqu’à n’en plus pouvoir, jusqu’à haïr le métier, et que malgré tout, on en redemande, parce que le reste du monde vous semble fade, vous ennuie à devenir fou. » Comme ce roman. On ne s’ennuie jamais et on en redemande…

 

H.D.

 

  • Mardi 26 avril à 18 heures à la Galerne au Havre. Entrée libre.