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« Rester dans le fantasme »

Photo Patrick Swirc
Photo Patrick Swirc

C’est un hommage à des femmes, à des chanteuses qui l’accompagnent depuis son enfance. Dans ce nouveau tour de chant, Agnès Jaoui explore à nouveau le répertoire sud-américain et aussi maghrébin et israélien. Elle a une belle voix de soprano qui envoûte, une oreille qui ne cesse de voyager. Avec le quintet Official, elle se promène dans des univers chaleureux et colorés. Agnès Jaoui chante mardi 25 novembre au Rive gauche à Saint-Etienne-du-Rouvray.

 

A quelle occasion entendiez-vous ces passionarias lorsque vous étiez enfant ?

Je les entendais sur le tourne-disque à la maison. Le mélomane de la famille était mon père. Il écoutait du fado, des chanteuses israéliennes. La musique d’Amérique latine est venue plus tard. Elle fait partie de mon chemin personnel.

 

Avez-vous des souvenirs précis de ces moments à écouter ces femmes ?

Précis ? Oui et non parce qu’il y avait de la musique tout le temps. Comme chez moi. Je n’ai pas de souvenirs de découverte. Elles me bouleversaient. J’étais et je suis toujours remuée, emportée. Les chansons me parlaient et aussi libéraient. Je me revois devant le miroir en train de marcher comme un militaire, en train d’écouter la musique de la Libération de Paris. Je trouvais ça très fort. J’en avais les larmes aux yeux. Il y avait aussi des chants révolutionnaires qui procuraient des émotions particulières.

 

Est-ce que vous imaginiez la vie de ces femmes ?

Non pas vraiment. A part peut-être Piaf parce qu’elle était plus proche. Je me souviens qu’un joue, ma mère a parlé des relations entre Piaf et les Compagnons de la chanson et que ma grand-mère a ajouté : elle n’a pas couché avec tout le monde ? J’ai lu quelques livres sur Barbara, des interviews d’elle. J’ai vite arrêté parce que tout cela la banalisait. Je n’aime pas trop en savoir. Je préfère rester dans le fantasme, dans l’idéal. Je suis très contente de n’avoir jamais lu une interview de Schubert par exemple. Néanmoins, je percevais une forme de liberté, de force, de singularité chez ces femmes.

 

Ces femmes sont pourtant liées à un pays, à une histoire, à un engagement.

Oui mais j’aime garder une part de mystère. Je les découvre par ailleurs lorsque je comprends les paroles des chansons. Ce sont des paroles fortes et vous pleurez pendant deux heures.

 

Est-ce qu’interpréter les chansons de ces femmes vous permet d’être sur une trace ?

Oui, un petit souvenir prend une autre dimension lorsque vous comprenez la chanson plus tard. L’émotion est démultipliée. C’est très, très fort.

 

 

 

Cette tournée est une nouvelle rencontre avec le quintet Official.

Oui, absolument, et j’espère poursuivre cette aventure pendant toute ma vie. On joue de mieux en mieux ensemble. Au début, ce n’était pas évident. Chacun a sa spécificité, son ego. Aujourd’hui, chacun connaît sa place et se connaît. C’est très enrichissant.

 

Avez-vous envie d’écrire des chansons avec le quintet ?

On essaie. Nous avons écrit deux chansons. Mais j’ai un blocage, je n’arrive pas à écrire des paroles. Le surmoi que je n’ai pas quand j’écris un film, je l’ai quand j’écris une chanson. C’est difficile. Je ne suis pas satisfaite. Je me demande ce que je vais dire, ce que j’ai envie de transmettre. Cela me renvoie à quelque chose de scolaire. Je n’ai pas encore trouvé ma forme de liberté.

 

Est-ce que votre prochain projet est musical ou cinématographique ?

Il y a les concerts, un prochain album avec les chansons des passionarias sur lequel nous travaillons. Pour le cinéma, nous, Jean-Pierre Bacri, Jamel Debbouze et moi, écrivons le prochain Astérix. Nous sommes même quatre… avec Astérix. Nous nous connaissons bien depuis longtemps et nous avons trouvé une façon de faire qui fonctionne très bien.

 

  • Mardi 25 novembre à 20h30 au Rive gauche à Saint-Etienne-du-Rouvray. Tarifs : de 25 à 15 €. Réservation au 02 32 91 94 94.