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Stéphanie d’Oustrac : « On se laisse toujours forcément envahir par l’émotion »

Carmen, Rosina dans Le Barbier de Séville, Dorabella dans Cosi fan tutte, Orphée, Mélisandre… Ce sont quelques rôles qu’a tenus Stéphanie d’Oustrac. La mezzo soprano est une des plus grandes interprètes françaises, invitée sur les scènes internationales prestigieuses. Remarquée par William Christie, cette arrière-petite-nièce des compositeurs Francis Poulenc et Jacques de la Presle a fait ses débuts avec des pièces baroques avant d’aborder un répertoire plus large et de se produire avec son ensemble Amarillis. Chanteuse et comédienne, Stéphanie d’Oustrac se distingue avec des prestations généreuses et justes. Elle sera la présidente du jury du Concours Corneille qui se déroule du 12 ai 15 septembre à la chapelle Corneille à Rouen. Interview.

Vous serez pour la première fois présidente d’un jury. Comment envisagez-vous ce nouvel rôle ?

Je n’ai jamais été présidente d’un jury et je n’ai même jamais été membre d’un jury. C’est une première pour moi. Jusqu’à présent, j’ai auditionné ces chanteurs. Les autres membres du jury ont plus d’expérience que moi. Je vais apprendre avec eux. Un tel concours demande une écoute attentionnée et sympathique. Quand on passe un examen, c’est déjà difficile. Quand on est face à des portes de prison, c’est encore plus compliqué. Comme j’ai envie que les candidats donnent le meilleur d’eux-mêmes, je vais avoir une attitude enthousiaste. Sinon, c’est la double peine.

Au début de votre carrière, vous avez été happée par le répertoire baroque. Est-ce qu’il a constitué un bagage pour la suite ?

J’ai eu la chance de rencontrer William Christie. Cela a été un bagage extraordinaire. Le style baroque demande une exigence. On est beaucoup dans l’interprétation. Le théâtre m’a beaucoup aidée, notamment dans le rapport à l’expression, au texte. L’époque baroque est très attachée au texte, aux personnages. Avec tout cela, on voit ce que l’on peut faire.

Que voulez-vous dire ?

On en revient au théâtre, au texte. La question reste : comment exprimer ce qui est écrit ? Dans ces contraintes d’écriture, il faut installer une forme de liberté. Notre travail consiste à intégrer cela pour que tout paraisse naturel. Si le texte est compliqué, c’est qu’il y a une volonté. Donc, il faut le marquer. Il faut aller loin dans les intentions. Cela demande un travail important au préalable tout en restant le plus malléable possible. Il faut avoir travaillé suffisamment le texte, digéré la partition pour rester ouvert aux attentes du chef et du metteur en scène. Ensemble, on va créer un objet commun. C’est pour cette raison que j’adore répéter. J’adore intégrer toutes ces réflexions.

Est-ce pour tenter de trouver l’interprétation la plus juste ?

Oui et aussi celle qui sera en commun avec les autres. On peut avoir une idée mais il ne faut pas oublier que nous créons un même objet. On va apporter des individualités pour installer une unité, une manière de faire.

Comment faites-vous pour ne pas vous laisser envahir par l’émotion ?

On se laisse toujours forcément envahir par l’émotion. C’est ce qui est très beau. C’est du jeu mais un jeu qui doit être sincère. Je me mets toujours dans la situation de mon personnage. Il ne faut pas oublier : on incarne un personnage. Celui-ci devient nôtre. Je les choisis avec attention parce que je dois pouvoir les comprendre, comprendre leur psyché et les aimer. Je comprends Médée et elle me touche. En revanche, je n’aime pas Popée.

Vous passez d’un rôle à un autre. Est-ce une gymnastique facile ?

On peut passer d’un répertoire à un autre mais il faut faire attention parce que l’on n’utilise pas les muscles de la même manière. Il faut un certain temps. Sinon on doit forcer la voix. Ce qui crée des crispations. Cette juxtaposition peut alors devenir dangereuse. Le plus important est de connaître ses limites et aussi ses envies afin de défendre ce que l’on aime. Au fil du temps, on affine ses goûts. J’ai envie de faire une incursion dans le bel canto. C’est un répertoire que j’apprécie. Les personnages sont magnifiques. La voix peut prendre le dessus sur l’interprétation.

Quand avez-vous pris conscience de toutes les couleurs de votre voix ?

Je les ai comprises quand j’ai fait du théâtre. La voix parlée est très expressive mais la voix chantée recèle plus de couleurs. Elle est encore plus riche. J’ai cherché tout ce que je n’arrivais pas à faire avec la voix parlée. La présence de la musique est extraordinaire.

Infos pratiques

  • Jeudi 12 septembre de 10 heures à 13 heures et de 14h30 à 18 heures : premier tour. Entrée libre
  • Vendredi 13 septembre de 11 heures à 12h30 et de 14 heures à 15h30 : premier tour. Entrée libre
  • Samedi 14 septembre de 11 heures à 13 heures et de 14 heures à 16 heures : deuxième tour. Entrée libre
  • Dimanche 15 septembre à 15 heures : finale. Tarif : 5 €.
  • Concours Corneille à la chapelle Corneille à Rouen
  • Réservation au 02 35 14 20 93 ou sur www.lepoemeharmonique.fr

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  • Gagnez des places pour la finale du concours Corneille dimanche 15 septembre à La Chapelle Corneille à Rouen.
  • Pour participer, likez la page Facebook de Relikto, partagez l’article, écrivez à relikto.contact@gmail.com en répondant à cette question : à quelle discipline l’édition 2019 du concours Corneille est-elle dédiée : au clavecin, au chant, au violoncelle ?