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Théâtre au CDN : des pirates en liberté

photo Mathieu Gervaise

Ce sont des pirates. Mais ceux-là viennent de l’Internet. Ils sont le fruit de l’imagination des collectifs OS’O et La Traverse qui évoquent dans Pavillon noir un territoire toujours à conquérir, de plus en plus mis sous surveillance. A voir du 7 au 9 février au CDN de Normandie Rouen.

photo Mathieu Gervaise

Des pirates, on a le plus souvent en tête l’image de ces hommes sinistres, barbares, avec une jambe de bois et assoiffés de richesse et de sang voguant sur de grands bateaux, plus proches de l’état d’épaves. Markus Rediker, historien de la piraterie, dresse un tableau bien plus complexes de ces marins singuliers à travers leur mode d’organisation. Sur leur vaisseau, orné de leur célèbre drapeau noir orné d’un crâne et de deux tibias croisés, ils prônaient la démocratie et l’égalité. Non seulement le capitaine était élu ou évincé par tous mais aussi le butin récolté était toujours distribué à part égale. Ils formaient un groupe, voulaient aussi être maîtres de leur destin.

Le collectif OS’O (On s’organise), installé à Bordeaux, s’est penché sur les pirates. Pas ceux des XVIIe et XVIIIe siècles mais ceux d’aujourd’hui. « Nous avons fait un parallèle avec les espaces de l’Internet. Là, on peut trouver des images de violence, de pornographie mais c’est aussi un beau moyen de communication, un espace de liberté à conquérir », explique Baptiste Girard, un des fondateurs de la troupe. Ils ont pensé aux figures du web, aux hackeurs, aux lanceurs d’alerte…

Sans outil numérique

Joué du 7 au 9 février au CDN de Normandie Rouen, Pavillon noir raconte l’histoire d’une jeune hackeuse, originaire du Kazakstan, placée sous surveillance, qui devra être sauvée par sept aventuriers du web. Le tout sans outil numérique. « C’était notre défi », remarque Baptiste Girard. « Tout passe par le jeu des comédiens. Tout s’incarne. Même dans le son et dans la lumière. Nous sommes dans le virtuel donc tout est possible. Au théâtre, tout est possible aussi ».

A travers ce thème de la piraterie moderne, le collectif OS’O qui a travaillé avec les auteurs de La Traverse s’interroge à nouveau à sa manière sur le monde contemporain et reste fidèle à son manifeste : «  nés dans les années 1980, nous appartenons à une génération qui regarde avec inquiétude le monde qu’elle a reçu en héritage. Un monde « désenchanté », sans idéologie, un monde sans mythe. De quel mythe avons-nous besoin aujourd’hui ? Par mythe, nous entendons un récit, une histoire capable de bouleverser notre vision du monde et nos pratiques sociales. Loin d’avoir la réponse, c’est en tout cas la question qui nous anime ».

Le collectif OS’O questionne ainsi la démocratie, des espaces de liberté à défendre. « C’est essentiel si on veut rester un citoyen libre, si on veut encore manifester dans la rue ». Les informations circulent et sont collectées à des fins mercantiles et sécuritaires. Pavillon noir est une pièce chorale et une alerte.

  • Mercredi 7, jeudi 8 et vendredi 9 février à 20 heures au théâtre des Deux-Rives à Rouen. Tarifs : 14 €, 9 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 70 22 82 ou sur www.cdn-normandierouen.fr
  • Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation du jeudi 8 février