/

Théâtre : Robin Renucci est professeur

photo JC Bardot
photo JC Bardot

Mademoiselle doit préparer un doctorat total. Il faudra donc revoir la géographie, l’arithmétique, la linguistique… Pour cela, elle va entamer une série de révisions avec le professeur. Cette Leçon de Ionesco qui commence dans un cadre strict se termine en farce tragique. L’enseignant s’empare de la parole et entre dans une spirale infernale ; profitant de la naïveté et de la fragilité de son élève avec la complicité d’une bonne austère. La Leçon de Ionesco, mise en scène par Christian Schiaretti pour les Tréteaux de France, fait partie de ces drames comiques irrésistibles. Robin Renucci joue ce professeur complètement cinglé mardi 9 et mercredi 10 décembre au Rive gauche à Saint-Etienne-du-Rouvray.

 

Existe-t-il un lien entre La leçon de Ionesco et les précédentes productions des Tréteaux, L’Ecole des femmes de Molière, Mademoiselle Julie de Strindberg… ?

Oui, La Leçon s’inscrit dans une thématique que je développe depuis mon arrivée aux Tréteaux de France, L’Emprise des cerveaux, des objets sur les cerveaux, d’une génération sur une autre… L’objectif est de mettre en scène des écritures qui ont une histoire dans la littérature. C’est une façon de parler des différentes époques.

 

Comment avez-vous appréhendé ce rôle de professeur ?

Le texte a été écrit avec une grande qualité de syntaxe. La langue française est très travaillée. C’est une écriture très complexe. La parole du professeur dure trois quarts d’heure. Ce qui est énorme. Cet homme cherche, en fait, à réduire le cerveau d’une jeune femme.

 

En quoi cette écriture reste complexe ?

Elle est compliquée parce qu’elle est en abyme. Dans ce texte, il y a beaucoup de phrases qui commencent par les mêmes mots. Pour un comédien, c’est un piège. Or, il a besoin de repères. Ce rôle demande une grande acuité, une grande faculté mémorielle. Il faut être un athlète de la mémoire.

 

Comment vous entrainez-vous pour rester cet athlète ?

Je sors d’un rôle dans L’Ecole des Femmes avec 1 200 vers. L’entraînement est quotidien.

 

Le personnage du professeur dans La Leçon s’exprime aussi beaucoup avec le corps.

Le langage du corps aide la mémoire. Ce sont d’autres repères.

 

Comment définiriez-vous ce professeur ?

Il y a de la perversité chez cet homme. A un moment, il devient fou. Il se dérègle. Son langage se durcit. Il a une emprise sur cette jeune fille. Il la rabat, la régresse. A la fin, il la tue. Comme dans les jeux télévisés. Aujourd’hui, on élimine. Dans La Leçon, il y a une mécanique un peu folle et très réaliste. Ce texte parle d’un monde qui est le nôtre, de ce que les adultes fabriquent pour les enfants. L’éducation est une structure qui détruit ce que l’école construit. Aujourd’hui, les gens bavardent, gesticulent et ils demandent aux enfants d’être concentrés. Ce monde est complètement déréglé. Cette question de l’éducation est encore plus centrale que dans les années 1950.

 

Est-ce que le personnage de la bonne est aussi essentiel que le professeur et la jeune femme ?

Elle est très importante parce qu’elle est un contrepoids. Elle materne le professeur. Elle a plus de bon sens que lui. Ils restent cependant deux affreux jojos. Ils sont parfaitement conscients de ce qu’ils font. Ils parviennent tout de même à tuer 40 élèves dans la journée. Cela représente une classe !

 

Pourquoi toutes les représentations sont suivies de débat ?

Parce que les gens ont envie de parler, d’exprimer ce qu’ils ressentent. La Leçon est certes une jolie piécette absurde d’une heure mais un texte très dense. Il faut parler de notre monde contemporain. C’est un chantier d’éducation populaire.

 

  • Mardi 9 et mercredi 10 décembre à 20h30 au Rive gauche à Saint-Etienne-du-Rouvray. Tarifs : de 25 à 15 €. Réservation au 02 32 91 94 94