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# 18 / Les street artistes sont prêts à investir la rue

Les street artistes attendent avec impatience le 11 mai pour partager leurs œuvres réalisées dans leur atelier pendant ces semaines de confinement. Témoignage d’InkOj, LizPonio et Teuthis.

L’art n’est plus dans les théâtres, les salles de concert, les cirques, les musées… Pas plus dans la rue. Depuis la mi-mars, les street artistes restent dans leur atelier et préparent l’après-confinement. Pour InkOj, « c’est une période de réflexion, de test. Je fais des essais avec un nouveau de type de peinture ». De son côté, LizPonio « n’arrête pas de faire de la peinture. Je prépare plein de collages. Heureusement que j’avais acheté beaucoup de matériel ». Teuthis, lui « dessine beaucoup. Cela ne change pas grand-chose pour moi. Je suis à mon bureau tous les jours. Je pense que je suis même plus discipliné dans mon travail ».

Après six semaines de confinement, la rue manque cruellement à ces artistes rouennais et havrais. « J’ai hâte d’y retourner », confie LizPonio. InkOj, isolé dans son grenier, a « un rapport fort à l’extérieur. La rue est un espace à la fois vivant avec des gens qui circulent et strict avec tous les règlements d’urbanisme. Le plus souvent, on fait les mêmes trajets et il n’y a pas beaucoup de surprises. J’ai envie de créer des surprises, de révéler ce qui est caché ». L’artiste rouennais est connu pour ses fresques au sol réalisés à partir de carreaux de ciment graphiques posés dans les entrées des immeubles dans le quartier Saint-Marc à Rouen. « Elles viennent égayer la ville. C’est un acte artistique qui vient bouleverser le quotidien. C’est aussi un vrai cadeau ». 

Teuthis, artiste havrais du collectif Are you graffing, a une toute autre démarche. Il « cartographie l’espace public » lors de ces promenades à vélo. Il recherche « le bon spot, un mur à l’abandon, un peu crado, assez uniforme et très visible » pour y plaquer ses collages monumentaux illustrant la faune marine. Des animaux, il y en a aussi dans le travail de LizPonio qui les intègre dans des milieux presque hostiles pour eux. Avec cette street artiste rouennaise, une autre nature s’invite ainsi en ville. Elle s’est fixée comme objectif de « combler des vides, remettre un peu de gaité. On pense à autre chose quand on regarde mes collages ».

Échanger avec les passants

La suite pour ces street artistes ? Ce sont de nouvelles fresques pour InkOj. Il a aussi souhaité « mettre son art au service du contexte actuel » et a imaginé une matérialisation des distances physiques devant les commerces. Il a terminé une grande œuvre pour l’hôpital Saint-Antoine à Paris. « C’est évidemment repoussé. J’espère que les projets ne sont pas annulée sinon la situation va être périlleuse ». Quant à Teuthis, il espère pouvoir aller à la Réunion au mois d’août pour installer son exposition et faire quelques collages dans les rues. Enfin, LizPonio s’est investie dans SAATO, un festival d’art urbain confié au profit des hôpitaux de Paris. Pour ce projet, elle a retrouvé le plaisir de travailler la peinture sur la toile. « J’ai pu me poser, prendre mon temps ».

Autre manque : la rencontre avec le public. Teuthis apprécie l’interaction avec les passants dans la rue. « La nuit, il n’y en a pas beaucoup. Je rencontre plus de monde à Paris. Parfois, on m’ignore. Parfois, on discute aussi. Les dessins suscitent une réflexion. Ça me plaît ». Tout comme InkOj : « comme j’aime tout faire à la main, proposer un truc artisanal, je travaille beaucoup dans la rue et j’ai un retour immédiat des gens »

Pour le 11 mai, InkOj, LizPonio et Teuthis sont prêts et restent néanmoins prudents. InkOj attendra « un peu, pour se refaire voir, le temps que tout le monde ressorte. Il ne faut pas se jeter dans la rue dès le premier soir ». De la part de LizPonio, il y a « encore un peu d’hésitation. Quand on pourra ressortir, la rue va être abordée d’œuvres. Et cela se fera dans la bonne humeur ». Les œuvres de Teuthis, sont déjà, dans le coffre de sa voiture.

Vers le site de inkOj
Teuthis au MuMA