Matthieu Prual : « les Cahiers de Nijinski, ce sont des moments d’incandescence »

Photo : Lucie Weeger

Le chorégraphe Vaslav Nijinski entame l’écriture de ses Cahiers quelques semaines avant son internement dans un hôpital psychiatrique. Reviennent des souvenirs et des angoisses. Il y autant d’amour que de rage dans ce texte joué par Denis Lavant vendredi 24 mars à l’espace Marc-Sangnier à Mont-Saint-Aignan. Le comédien est accompagné par Gaspar Claus, violoncelliste, et Matthieu Prual, clarinettiste et saxophoniste, qui signe la bande son de ce spectacle. Entretien avec le musicien.

Qu’est-ce qui a résonné en vous à la lecture des Cahiers de Nijinski ?

Ce qui a résonné, c’est le changement de paradigme. Mais ce n’est pas tant une résonance qu’un sentiment. À ce moment-là, le sentiment est le plus fort. C’est quelque chose que j’ai reconnu. La rationalité est moins forte pour aller vers le sensible et l’instinctif.

Qu’est-ce qui est important pour vous dans ce texte ?

À travers ce texte, nous nous sommes attachés à retrouver l’homme que Nijinski était à un moment charnière de sa vie. Cet homme, chorégraphe et danseur, qui a beaucoup travaillé avec son corps et sa pensée. Il est un archétype du poète qui veut dire une chose sans vraiment vouloir le dire. Pourtant, il n’a plus d’autre choix que de parler. Les Cahiers de Nijinski, ce sont des moments d’incandescence, de fulgurances qui touchent, indépendamment de son geste chorégraphique.

Comment avez-vous travaillé ?

Le texte est issu de l’édition de 1992 chez Actes Sud qui a été adapté par Christian Dumais-Lvowski. J’ai donc travaillé sur une adaptation de l’adaptation en retenant des passages qui me tenaient à cœur. À l’épreuve de la scène, j’ai ensuite affiné le texte avec Gaspar et Denis. Il a aussi fallu trouver un chemin avec Denis à travers une écriture difficile parce que fragmentée. Elle glisse de thèmes en thèmes.

Pourquoi Denis Lavant était le comédien idéal ?

C’était une évidence. Je l’ai rencontré une première fois autour de la figure d’Édouard Glissant, puis dans un opéra. Nous avions évoqué la figure de Nijinski. Denis l’a beaucoup étudié pour préparer des rôles parce qu’il se considère avant tout comme un danseur. Dans son travail de comédien, la physicalité est très importante. Dans ses recherches, il y a aussi Artaud, Van Gogh. Ce sont toutes des personnes qui ont été sacrifiées par la société. Il y a chez elles une intransigeance totale vis-à-vis de l’art. Denis a aussi quelque chose de cet ordre-là.

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour la composition de la musique de ce spectacle ?

J’ai découvert la figure de Nijinski par la musique de Stravinsky. Celle-ci m’a passionné pendant un moment. Avec Gaspar, nous avons des connivences musicales et une sensibilité au texte. Nous avons déjà donné quelques récitals de poésie ensemble. Avec les Cahiers, nous avons travaillé avec cette idée d’être l’influx nerveux de Nijinski, d’être le partenaire sonore à la fois du chorégraphe et de Denis. Il y a également quelques légères influences de Debussy et de Ravel. C’est une composition orale qui offre beaucoup de souplesse.

Infos pratiques

  • Vendredi 24 mars à 20 heures à l’espace Marc-Sangnier à Mont-Saint-Aignan
  • Tarifs : de 15 à 1 €
  • Réservation au 02 79 18 99 00 ou sur www.montsaintaignan.fr