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Angélique Kidjo au 106 : « La musique est une note d’espoir dans ce combat »

photo Louri Lanquette

 

photo Louri Lanquette

Angélique Kidjo donne une lecture très personnelle de Remain in light, le fabuleux album des Talking Heads. Elle donne aux différents titres une ambiance électrique et un groove incroyable. La chanteuse béninoise est en concert mardi 27 novembre au 106 à Rouen avec L’Etincelle. Entretien

Qu’a représenté les Talking Heads pour vous ?

J’ai découvert la musique des Talking Heads quand je suis arrivée à Paris après mon exil du Bénin. Pendant la dictature au Benin, nous ne recevions pas beaucoup de musique. En France, j’ai soudain découvert un nouvel univers musical et, de façon étrange, la chanson Once In A Lifetime m’a touchée car elle me rappelait les rythmes de chez moi. J’ai appris plus tard que l’album Remain In light était inspiré par la musique de l’Afrique de L’Ouest et notamment celle de Fela Kuti.

Once in a lifetime est le premier titre que vous avez entendu de Remain in light. Quelles émotions vous ont traversée ?

Une sorte de nostalgie des rythmes et des musiques du Benin mais aussi une sorte d’angoisse qui résonnait avec mon dépaysement. Les Talking Heads eux, réagissaient à l’arrivée de Ronald Reagan au pouvoir aux USA.

Cet album marque l’histoire de la musique. Qu’a-t-il de singulier pour vous ?

C’est la première fusion entre le rock et l’esprit de la musique africaine. Le rock s’inspirait du blues, donc du chant des esclaves africains mais en écoutant directement ses racines africaines, il s’ouvrait à un nouvel univers.

 

 

Comment résonne-t-il aujourd’hui ? Peut-on faire un parallèle entre l’époque de sa sortie et aujourd’hui ?

Bien sûr ! L’élection de 2016 de Donald Trump a rouvert des blessures que l’on croyait fermées depuis longtemps. Et la même angoisse existentielle qui avait touché le groupe en 1980 réapparaît aujourd’hui dans notre monde de “Fake News ».

Comment vous êtes-vous appropriée cet album ?

Je travaillais a la fois sur la reprise de l’album et aussi sur une idée d’album de musique traditionnelle du Bénin. Ni l’une ni l’autre ne me satisfaisaient complètement. Soudain j’ai eu l’idée de mélanger les deux projets et miraculeusement les chants traditionnels de Benin se sont mariés naturellement avec les grooves hypnotiques de l’afro-beat revisités par les Talking Heads.

Comment comprendre les textes de Remain in light aujourd’hui ? Notamment Born under punches ?

Pour moi Born under punches parle de la corruption. C’est un problème majeur et non pas seulement en Afrique comme on veut nous le faire croire. Cette corruption qui accroit les inégalités, renforce les frustrations finit par amener les populistes au pouvoir ! Et l’histoire nous apprend qu’ils ne régleront pas ce problème mais l’accentueront. La musique pour moi est une note d’espoir dans ce combat. Elle exprime notre humanité commune de la meilleure façon possible !

 

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