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Anne-Cécile Vandalem au Volcan : « Les tristesses nous empêchent d’agir »

tristessesAnne-Cécile Vandalem revient au Volcan au Havre avec un spectacle qui emprunte autant les codes du théâtre, du cinéma et du polar. Présenté mardi 8 et mercredi 9 novembre, Tristesses évoque la désillusion des peuples. Autrice, metteure en scène de la compagnie Das Fräulein, Anne-Cécile Vandalem aborde la montée des partis d’extrême droite en Europe. Sur l’île de Tristesses, la mère de Martha Heiger, chef de file du parti du Réveil populaire qui trouve un grand écho dans les pays du nord de l’Europe, s’est pendue au drapeau du Danemark. Le jour des funérailles, deux adolescentes veulent interpeler Martha Heiger. Tout va basculer. Entretien avec Anne-Cécile Vandalem.

 

Pourquoi avez-vous écrit Tristesses au pluriel ?

Dans cette pièce, plusieurs formes de tristesse sont racontées. Je suis partie d’une lecture spinozienne de Deleuze. Il y a toutes ces tristesses qui se rajoutent chaque jour, que l’on maintient en nous mais qui agissent sur le corps et nous empêchent d’agir, d’avancer.

 

Pourquoi situez-vous la pièce au Danemark, a priori le pays où les habitants sont les plus heureux ?

Le Danemark fait en effet partie des pays où il fait bon vivre, où les gens sont les plus heureux. Dans ce pays, on sait aussi mettre en place des politiques sociales, économiques. Mais, on constate parallèlement une montée des populismes, un rejet de l’autre. On a des privilèges et on ne veut pas les partager. C’est la même chose en France, en Grèce.

 

Il était nécessaire pour vous de vous appuyer sur des faits pour écrire Tristesses.

Je m’appuie toujours des éléments concrets. Mes spectacles se situent entre le fait divers et la fable. Il y a une vraie nécessité pour moi d’inscrire une histoire dans un présent, un lieu identifié pour parler de ce qui se passe maintenant et de ce qui va se passer. J’ai pris comme point de départ à cette écriture la montée des partis d’extrême droite et la tristesse qui engendre une impuissance. Les partis sont à l’œuvre partout et maintiennent les gens là-dedans. C’est la désespérance complète.

 

 

 

Avez-vous pensé à un homme ou une femme politique en particulier pour imaginer le personnage de Martha ?

Je suis partie de plusieurs modèles. Je me suis rendue compte que les femmes des partis populistes prennent des attributs masculins. Elles mettent un peu de leur côté féminin sur scène. C’est pire que tout parce que c’est un cynisme complet. Ces femmes sont manipulées par une dynamique de force masculine. Tout cela m’intéresse et m’interpelle.

 

Pourquoi avez-vous choisi d’interpréter Martha Heiger ?

J’avais besoin d’éprouver ce personnage sur scène. Ce genre de personnage est assez vide. Il s’apprivoise et se nourrit d’une situation. Il déclenche les choses par sa seule présence. Il n’y a donc qu’à interpréter.

 

Qu’est-ce qui vous séduit dans le polar ?

Je suis une grande lectrice de polars. J’aime quand une histoire s’appuie sur une intrigue. Dans un polar, il faut aller plus loin dans la psychologie des personnages. Leur étude doit être précise, assez réaliste. Ils prennent une autre dimension. Ils en deviennent tragiques, burlesques. Dans Tristesses, ils sont des perdants, des impuissants et aussi des crapules parce qu’ils sont dans la dynamique du conflit. Par ailleurs, dans un polar, on est focalisé sur eux, sur l’intrigue. C’est très jouissif.

 

Dans Tristesses, le polar se mêle au théâtre et au cinéma.

Dans Tristesses, on est entre le théâtre et le cinéma. L’histoire, c’est un film qui se réalise. Sur le plateau, il y a un espace public où les personnages se rencontrent. Ils sont filmés dans leur maison. On donne à voir ce qui ne devrait peut-être pas être vu. Cela crée une dynamique entre les sphères publique et privée.

 

  • Mardi 8 novembre à 20h30, mercredi 9 novembre à 19h30 au Volcan au Havre. Tarifs : 23 €, 9 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 19 10 20 ou sur www.levolcan.com