« Crime et châtiment » selon Sabine Meier

Portrait of a man (Rodion Romanovitch Raskolnikov) ressemble à un roman-feuilleton. Sabine Meier s’est inspirée de Crime et Châtiment de Dostoïevski pour cette série de photographies prises à New York et au Havre. L’exposition est présentée au musée Malraux au Havre jusqu’au 6 mars.

Quand Sabine Meier a commencé à réfléchir sur sa résidence à New York, Crime et châtiment lui a traversé l’esprit. « C’est tombé un soir alors que je pliais du linge. Ce truc est arrivé devant mes yeux. Je l’ai pris et je l’ai testé ».

Pas facile d’établir d’emblée des liens entre la ville américaine et le roman de Dostoïevski se déroulant à Saint-Pétersbourg au milieu du XIXe siècle. Pour Sabine Meier, il y a des similitudes évidentes. « A New York, tout est très grand, très haut, très loin. En même temps, il y a une foultitude de détails, comme des frises sur les buildings. Après mes promenades dans cette ville, j’étais fatiguée d’avoir observé ces choses minuscules et ces choses tellement grandes que je pouvais appréhender. Crime et châtiment, c’est pareil. Dostoïevski fait des contractions et des dilatations à l’infini ».

Pour raconter son Crime et châtiment, la photographe havraise a dû trouver son héros. « J’ai eu un flash sur cette personne. Ce fut comme un coup de foudre amoureux ». Sabine Meier a aperçu dans la foule new-yorkaise Benjamin George Filinson qui a accepté sa proposition. Etrange hasard : le modèle de Sabine Meier a eu un grand-père russe qui a tué l’amant de sa femme. « Benjamin s’est engagé complètement dans le travail. Je lui ai demandé de ne pas jouer. Son corps suffisait. Il a une présence et une intuition folles. C’est une intuition inconsciente. Il faut regarder son visage, ses mains très expressives ».

Une mise en scène

Dans Crime et Châtiment, le héros, Raskolnikov, habite deux espaces : sa chambre où il ne sort jamais de son lit et les rues où il erre. L’espace et la lumière extérieurs, Sabine Meier les a trouvés à New York. Pour cette photographe de studio, il fallu adapter ses modalités de travail. Elle a aussi photographié dans le métro de New York, semblable à un no man’s land. Elle a poursuivi sa série en août 2012 au Havre avec son modèle qui a accepté de la rejoindre en France. Elle a pris des vues dans des escaliers. « Ce sont des moments importants parce que Raskolnikov compte les marches pour arriver jusqu’au lieu du crime. C’est aussi une ascension vers l’enfer ».

Dans son œuvre, Sabine Meier s’est très souvent interrogée sur la représentation, sur le corps dans son rapport à l’image. Dans Portrait of a man (Rodion Romanovitch Raskolnikov), elle met en scène son modèle, comme en peinture, et offre un portrait intérieur. L’exposition est à l’image du parcours mental du héros de Dostoïevski. C’est un véritable labyrinthe dans une conscience torturée, un cheminement souterrain dans lequel un homme cherche sa place dans le monde.

Infos pratiques

  • Jusqu’au 6 mars, tous les jours de la semaine, sauf le mardi, de 11 heures à 18 heures, les samedis et dimanche de 11 heures à 19 heures au musée Malraux au Havre.
  • Tarifs : 5 €, 3 €, entrée gratuite pour les moins de 26 ans, les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires des minima sociaux, pour tous les premiers samedi de chaque mois.
  • Renseignements au 02 35 19 62 62 ou sur www.muma-lehavre.fr