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J’aime tes jambes…

photo Richard Volante
photo Richard Volante

Dans Mes Jambres, si vous saviez, quelle fumée…, Bruno Geslin dresse un portrait poétique de Pierre Molinier, peintre et photographe. C’est Pierre Maillet qui porte la parole de cet être libre. Le spectacle se joue mardi 3 décembre au théâtre des Chalands à Val-de-Reuil dans le cadre d’Automne en Normandie.

 

Pierre Molinier selon Bruno Geslin

Le metteur en scène a découvert le travail de Pierre Molinier à travers la photographie. « J’étais assez jeune. Je me souviens que cela m’avait renversé. Mais je n’arrivais pas à savoir ce que cela produisait chez moi : de la peur, du désir, de l’inquiétude, du malaise ou tout cela en même temps ».  Il a lu plus tard Une Vie d’enfer, une biographie signée par Pierre Petit. « J’ai alors découvert un personnage à l’opposé de ce que j’imaginais. J’avais en tête une créature monstrueuse, mi-homme, mi-femme, assez sombre. Je découvrais un type solaire avec un humour incroyable, avec un discours d’une immense liberté ».

Puis, il y a eu les entretiens avec Pierre Chaveau, le spectacle. Aujourd’hui, Pierre Molinier est devenu comme « un grand oncle ». « Quand vous rencontrez ce bonhomme, il fait partie de votre vie. Et son travail artistique lui donne une part d’éternité ».

 

Pierre Molinier selon Pierre Maillet

Pour Pierre Maillet, Pierre Molinier est « un être inclassable, un peintre en bâtiment et un artiste peintre, fétichiste des bas et des talons. Il était marié. Il avait des enfants. C’était un homme qui sortait de tout schéma social ». Pierre Molinier, travesti, bisexuel, a incarné la confusion des genres, prônait le désir sous toutes ses formes. Il a voulu faire de sa vie et de ses fantasmes une œuvre.

 

Pierre Molinier, une parole libre et révoltée

Bruno Geslin et Pierre Maillet retiennent surtout la parole de Pierre Molinier. Une parole libre. « C’était un homme libre qui a une colère saine, une espèce de colère infinie de ne pas être homme et femme à la fois. Il y a également une lutte contre le temps, contre le vieillissement. C’est un peu un Don Quichotte menant des combats perdus. C’est assez héroïque », remarque Bruno Geslin.

Pierre Maillet apprécie également la liberté de pensée et de parole de Pierre Molinier. « Il a une vision très moderne des choses. Il interroge la liberté des autres, nos passions. Il a une vraie intelligence dans le rapport à l’autre. Il a une vision singulière de l’art et de la vie. Il le dit : quand j’en aurais marre, je m’en irai. Il est très touchant. Je ne me lasse pas de cette parole. Elle fait un bien fou ».

 

Pierre Molinier sur un plateau

Bruno Geslin a décelé une matière théâtrale dans ces entretiens. « C’est très riche. Il y a tellement de degrés de lecture que cette matière devient inspirante. Nous ne voulions pas apporter un point de vue universitaire mais prendre Pierre Molinier du côté de la sensation et de l’expérience. Nous nous sommes alors installés dans une maison et nous avons essayé de refaire ses photos à l’identique ».

Ce spectacle, Mes Jambes, si vous saviez, quelle fumée… a été écrit sur le plateau avec Pierre Maillet. « J’ai beaucoup écouté Pierre Molinier et je me suis imprégné d’un esprit, d’une musique de texte. Sur scène, je dis uniquement ce qu’il a dit. Je suis ainsi dans un rapport direct avec le public ».

Autour de Pierre Maillet, se trouvent Elise Vigier, habitée par les femmes qui ont été importantes dans la vie de Pierre Molinier, et le danseur Nicolas Fayol qui incarne des fantômes et des souvenirs. Mes Jambes est un parcours dans les méandres de la pensée d’un artiste subversif.

 

 

  • Mercredi 3 décembre à 20h30 au théâtre des Chalands à Val-de-Reuil. Tarifs : 16 €, 13 €. Réservation au 02 32 10 87 07 ou sur www.automne-en-normandie.com
  • Navette au départ d’Evreux à 19h15
  • Rencontre avec Bruno Geslin à l’issue de la représentation
  • Spectacle réservé à un public adulte