Jean-Paul Delore : « Il y a un dialogue permanent et impossible à l’intérieur de nous »

photo : Rémi Angeli

Auteur et comédien, metteur en scène et directeur de la compagnie lyonnaise LZD Lézard dramatique, Jean-Paul Delore aime l’inconnu et les rencontres artistiques, surtout lorsqu’elles peuvent être le point de départ à une écriture. Avec 2 fois toi, il propose une collection de pièces courtes, un dialogue intérieur à deux interprètes qui ne sont qu’une seule et même personne à deux âges différents. Au Tangram à Évreux, ce sera avec Vîrus, rappeur à la poésie ténébreuse, Eliott Farazza, Nach – danseuse krump, et la batteuse Yuko Oshima. Jean-Paul Delore est aussi à la tête des Carnets Sud/Nord réunissant des artistes de plusieurs continents. Avec les musiciens Louis Sclavis et Sébastien Boisseau, il fera découvrir dans Langues et Lueurs des textes d’auteurs africains de Sony Labou Tansi,  Dieudonné Niangouna, Mia Couto, qu’il mêle à des écrits de Baudelaire et Michaux. Deux occasions de voir Jean-Paul Delore les 26 et 28 mai au théâtre Legendre avec Le Tangram à Évreux.

Quel est le point de départ de chaque version de 2 fois toi ?

À chaque fois, ce sont des rencontres avec des artistes qui m’inspirent et m’intriguent, des univers qui m’impressionnent. Je commence, comme un jeu, avec un portrait chinois. Il y a un mélange d’intuition et de réflexion. Chaque duo peut être considéré comme un portrait imaginaire. Il y a des histoires plus ou moins gaie, plus ou moins tragiques.

Comment s’est déroulée la rencontre avec Vîrus ?

C’est un vidéaste qui me l’a présenté. J’ai été conquis par son univers mélancolique et ludique, ses punchlines, son côté sombre et son regard sur l’enfance qu’il considère comme un territoire abandonné. Pour lui, ce n’est pas toujours une période heureuse. Vîrus a écrit le texte sur ce personnage, Gorf.

Qu’est-ce qui vous a intrigué chez Nach et Yuko Oshima ?

Nach est une danseuse particulière. Le krump est une danse de défi, de sensation, de sentiments, une danse puissante et évocatrice. Elle est aussi attirée par le butō, beaucoup plus minimaliste. Elle a ainsi un répertoire très riche et physique. C’est ce qui m’intrigue chez elle. Quant à Yuko, elle a un jeu puissant et précis. Tous les deux ne se connaissaient pas.

2 fois toi interroge l’enfance. Pourquoi souhaitez-vous revenir à ce thème ?

L’enfant est toujours là. Il habite en nous. Il nous hante, nous poursuit et nous questionne. Et ce, à notre insu. Il reste des traces. Heureusement ou malheureusement, celles-ci jaillissent à l’occasion d’événements. Il y a ainsi un dialogue permanent et impossible à l’intérieur de nous. Ce spectacle interroge l’enfance comme un territoire perdu, maudit et rêvé.

Dans Langues et Lueurs, vous vous transportez en Afrique. Quel rapport avez-vous avec ce continent ?

J’ai un rapport particulier avec le continent africain qui est immense et possède de nombreuses facettes. Je travaille avec des artistes de l’Afrique australe et centrale et rencontre des poètes. J’ai envie de faire partager ces objets littéraires, de transmettre ces termes rares avec cet outil qui m’accompagne, la musique.

Que sont des perles rares ?

Pour ces auteurs, la langue française n’est pas leur langue maternelle. Ils ont dû l’acquérir, parfois, la combattre et aussi la réinventer. Ils inventent des expressions. Il ne faut pas trouver là de l’exotisme mais de la poésie.

Quel est le fil rouge de Langues et Lueurs ?

Le fil rouge, c’est le refus, la révolte, le rejet des habitudes et des convenances. C’est tout le contraire de ce que nous sommes. Ils ne sont pas satisfaits de leur condition humaine et ils l’écrivent avec humour et autodérision. J’ai beaucoup d’admiration pour ces auteurs.

Infos pratiques

  • 2 fois toi : mercredi 26 mai à 19 heures au théâtre Legendre à Évreux. Tarifs : de 20 à 10 €. Pour les étudiants :  carte Culture. Réservation au 02 32 29 63 32 ou sur www.letangram.com
  • Langues et Lueurs : vendredi 28 mai à 19 heures au théâtre Legendre à Évreux. Tarifs : de 20 à 10 €. Pour les étudiants :  carte Culture. Réservation au 02 32 29 63 32 ou sur www.letangram.com
  • photo : Rémi Angeli