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# 49 / Le secteur culturel passe à l’action

photo : DR

Jusqu’à présent, le milieu culturel a écouté, s’est plié aux décisions gouvernementales. Après la prise de parole du Premier ministre du 10 décembre, l’abattement s’est mué en colère. Place désormais à l’action avec un référé-liberté déposé au conseil d’État et plusieurs manifestations en France cette semaine.

Ce n’est pas le 15 décembre 2020. Ce ne sera peut-être pas non plus le 7 janvier 2021, date de la « revoyure ». Les lieux culturels restent donc fermés au public. Une décision annoncée lors d’une nouvelle prise de parole du Premier ministre jeudi 10 décembre, avant la première étape du déconfinement et une éventuelle réouverture des théâtres, salles de concerts, musées, cinémas… Depuis le début de la pandémie, le monde culturel joue au yoyo et devient une variable d’ajustement ; démontrant une nouvelle fois le manque de considération pour toute une profession. Cette fois, il a été assommé et la colère est montée.

« Ce n’est pas une colère brutale mais une force vitale qui permet de se positionner. Pendant ces dix mois, nous avons été exemplaires. Nous réclamons notre part de responsabilité et dans le choix des décisions ». David Bobée, metteur en scène et directeur du CDN de Normandie Rouen, est un des 1 200 signataires à l’appel au soutien du référé-liberté intersyndical pour la réouverture des lieux de spectacle vivant. Une procédure d’urgence déjà employée pendant la pandémie qui est menée devant le conseil d’État. Plusieurs manifestations se tiendront à Paris et dans plusieurs grandes villes ce mardi 15 décembre, le midi, au moment du dépôt du document.

De l’équité

Diverses raisons à cette colère : il y a tout d’abord le délai. Les professionnels de la culture ont été prévenus seulement cinq jours avant la possible reprise. « Le 15 décembre était une perspective à laquelle nous nous étions accrochés, confie David Bobée. Nous avions cette petite fenêtre de dix jours avant la période de Noël et nous étions prêts. Au-delà de la prévenance, c’est terrible humainement et financièrement. Ce stop and go épuise les équipes et les intermittents qui sont aux Assédic depuis dix mois. Et on ne vit pas bien au chômage » L’absence de concertation n’a pas non plus été digérée. « C’est difficile à vivre. Cette décision est autoritaire. On peut quand même réfléchir ensemble ».

Le choix du gouvernement est aussi loin d’être équitable. « Nous pouvons faire le taf comme dans les églises. Si nous devons accueillir 30 personnes, nous accueillerons 30 personnes et nous multiplierons le nombre de représentations. Nous pouvons nous adapter à cette réalité. Nous ne voulons pas être l’inutile, le facultatif. Il y a un service public à définir pendant cette période de crise à durée indéterminée. Si l’école est ouverte, le service public culturel le peut aussi. Nous sommes l’éducation populaire. Nous devons pouvoir travailler avec les scolaires. Sinon, on va fabriquer une génération carnage. Nous ferons le job parce que nous mettrons des mots sur ce que nous sommes en train de vivre », remarque le directeur du CDN de Normandie Rouen. Avec un tel refus de rouvrir les lieux, le Premier ministre renvoie la culture dans la case de simple divertissement.

Ouverture de tous les commerces, des lieux de cultes mais pas des espaces culturels… Où est la logique ? David Bobée la cherche encore. « On nous dit que nos théâtres ne sont pas dangereux. Mais on les laisse fermer pour éviter les circulations de personnes. Nous sommes responsables et en capacité d’inventer des perspectives ». Le metteur en scène ne se fait guère d’illusion quant à l’issue du dépôt du référé-liberté. Il va donc falloir de la patience. « Je ne peux rien faire. J’attends le 7 janvier pour savoir si on peut jouer le 8 ou si on annule Le 8 ».