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Léa Dant à l’Atelier 231 : « Le corps est très présent comme un outil »

photo Laurent Noël
photo Laurent Noël

Sur le plateau, Léa Dant réunit quatre performeuses, trois comédiennes et une danseuse. Quatre femmes pour parler des femmes, des images de la femme, qu’elle soit mère, amante, épouse, sainte, au travail…, de tout ce vibre dans leur for intérieur, des expériences les plus intimes. Sous La Chair, créé mercredi 16 et jeudi 17 mai à l’Atelier 231 à Sotteville-lès-Rouen avec le CDN de Normandie Rouen, donne à ressentir à travers divers tableaux les émotions et témoigne de la force et de la liberté des femmes. Entretien avec la metteure en scène.

Dans vos spectacles précédents, vous avez placé le spectateur comme un acteur d’une expérience artistique. Qu’en est-il pour Sous La Chair ?

C’est un spectacle très écrit. Sous La Chair marque ainsi un tournant dans ma trajectoire. Jusqu’à présent, il y a eu beaucoup de création participative, des expériences à vivre. Pour la première fois, j’ai opté pour une écriture de plateau très visuelle. Quelque chose de fort s’est produit lorsque les quatre interprètes, avec leur tempérament différent et complémentaire, se sont retrouvées. Pendant les phases d’écriture qui se sont étalées sur trois ans, nous avons partagé une aventure. Nos univers se sont rencontrés. La richesse des expériences et des personnalités de chacune, leur zone d’ombre, leur force, leurs valeur ont nourri ce spectacle. Cela a été très fort en terme créatif et humain.

Le corps est-il au centre de cette création ?

Le corps est très présent comme un outil, une clé, une porte d’entrée. Les quatre interprètes jouent avec leur corps, leur peau, le mouvement, l’énergie. Le corps est un support d’expression.

Pourquoi un découpage par tableaux ?

Ce sont des tableaux oniriques avec des thématiques pour être dans un ressenti intime. C’est très évocateur afin de parler à l’inconscient.

Est-ce seulement un spectacle sur les femmes et pour les femmes ?

Au début, je l’ai imaginé pour les hommes. Le point de départ de ce spectacle est un trop plein. Quand on arrive à la quarantaine, quelque chose se libère. Nous ne sommes plus dans l’envie de plaire mais d’être à 100 % nous-mêmes pas seulement en tant qu’artistes mais aussi en tant que femmes. Il y avait en fait un trop plein de souffrance. J’ai eu envie de présenter aux hommes ce que les femmes peuvent ressentir, comment elles vivent leurs expériences de vie. J’ai vécu deux IVG douloureuses. J’ai voulu parler de ce que j’ai vécu dans ma psyché et dans ma chair. Les hommes peuvent intellectualiser cela mais pas le ressentir. Je les invitais dans ce voyage intérieur. Après trois ans et demi de création, cette envie de départ a évolué.

Avec ce spectacle, vous avez célébré la femme ou témoigné d’une expérience ?

J’ai voulu plutôt témoigner, souligner les aspects de la femme qui me touchent. Comme sa liberté, son audace, son courage et aussi la sororité. Quand j’ai réuni ces quatre femmes sur scène, j’ai vu beaucoup de bienveillance et de solidarité entre elles. C’est très agréable à vivre et c’est un sujet très peu abordé.

Comment l’actualité, les mouvements MeToo ou BalanceTonPorc, résonne dans Sous La Chair ?

Je suis heureuse de cette évolution. La première année, la manière dont le spectacle a été reçu a été très difficile. On m’a dit : encore une affaire de bonne femme… Je n’étais pas trop aidée. Cette actualité a été un petit miracle. Il y a eu une prise de conscience du sujet.

Est-ce qu’il y a un côté militant ?

Non, pas dans la manière dont les propos sont formulés. Cependant, quand on se positionne en tant que femme, cela reste militant dans la société. Tout n’est toujours pas acquis. Le spectacle peut être hyper politique mais à un endroit de l’intime.

  • Mercredi 16 et jeudi 17 mai à 20 heures à l’Atelier 231 à Sotteville-lès-Rouen. Tarifs : 14 €, 9 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 70 22 82 ou sur www.cdn-normandierouen.fr
  • Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation du jeudi 17 mai