Nosfell : « Je ne veux pas être une caricature de moi-même »

photo Manu Wino

Impossible de mettre Nosfell dans une case musicale tant le chanteur a développé un univers très singulier. Homme élégant à la voix, tantôt cristalline, tantôt grave, il emmène dans des contrées fantastiques. Après quelques années passées à collaborer avec divers artistes, notamment Philippe Découflé, Nosfell s’offre une tournée en solo pour revisiter son répertoire et faire découvrir les titres de son nouvel album. Il sera mardi 14 mars à l’espace culturel François-Mitterrand à Canteleu. Entretien.

Ces dernières années, vous avez multiplié les collaborations. Comment embrassez-vous les différentes disciplines artistiques ?

Ce sont des choses qui sont venues à moi sans que je le calcule. Je suis un artiste autodidacte. J’apprends en faisant les choses. La danse est une discipline dont on me parlait souvent. J’ai rencontré des chorégraphes, des danseurs et j’ai discuté avec eux de la manière dont je pouvais rendre cela encore plus palpable. Travailler dans le spectacle vivant, que ce soit dans la danse ou dans le théâtre, m’a beaucoup intéressé pendant ces années.

Comment avez-vous vécu ces moments ?

J’ai l’impression d’avoir été à l’école. Cela m’a permis de confirmer ou d’infirmer des choix. J’ai aussi eu l’opportunité de travailler avec des vocabulaires différents. J’ai pu développer de nouvelles formes d’écriture lorsque j’ai composé pour des orchestres classiques. Moi, je défends une musique inspirée des musiques populaires. C’est ma culture de base. Même si je parviens à faire de grands écarts.

Comment l’univers de Klokochazia vous accompagne encore ?

Il m’accompagne toujours. C’est tatoué sur ma peau. Il fera donc toujours partie de moi. Quand j’étais enfant, mon père me parlait avec ce langage inventé. Il me racontait des histoires dans cette langue. Et on m’a découvert avec cet univers. Depuis le début, je veux défendre une autre écriture, montrer que je suis capable d’écrire autre chose. Beaucoup de mes copains faisaient du rap. J’ai toujours voulu développer ma culture sans renier d’où je viens. Aujourd’hui, Je suis davantage dans une autre forme d’écriture. Je suis dans un théâtre d’une seule voix, proche de la performance vocale.

Dans le monde de Klokochazia, la nature était présente. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Je reste attaché à la nature. Et ce, depuis que je suis tout petit. La nature permet un rapport avec l’infiniment petit comme à l’infiniment grand. C’est un cocon que je me crée parce que je vis dans l’univers du bitume, de la ville. Tout cela fait référence à l’enfance de mon père qui a grandi dans les montagnes berbères. J’ai connu un peu ces endroits et je les garde profondément en moi.

Est-ce que l’écriture est une perpétuelle recherche ?

C’est un travail au long cours. J’utilise différents vocabulaires. Ce qui me permet de sortir le meilleur de moi-même, surtout de ne pas me répéter, de ne pas m’enfermer dans une forme particulière. Je ne veux pas être une caricature de moi-même. C’est important de développer d’autres vocabulaires, tout en peaufinant une écriture globale. Bowie qui est notre maître à tous en est un excellent exemple. Cette mise en danger est toujours inspirante. Il ne faut jamais capitaliser sur ce que l’on fait. C’est pour cette raison qu’écrire n’est pas un métier. Un artiste doit donner quelque chose de fragile et non rassurant. Je ne vois que du positif dans tout cela. Cela ne m’empêche pas de prendre du plaisir.

Lors de cette tournée en solo, vous dévoilez les titres du prochain album. Quelle en sera la couleur musicale ?

Je travaille encore sur les textes et je me suis lancé sur les synthés, les vieilles machines des années 1970. Je remets aussi la voix au centre du projet. J’ai choisi une même orchestration. En fait, je reviens à mes premières amours, aux premier et deuxième albums, à une forme simple. Cet album aura deux hémisphères avec des textes en anglais et en français. C’est comme si c’était la préhistoire de mon parcours musical.

Et les textes ?

J’ai beaucoup écrit sur mes rêves. En fait, j’ai appris à noter mes rêves. Enfant, mon père me demandais de lui raconter mes rêves. Je suis dans une dynamique de conteur. Pour cet album, il y a eu la nécessité d’écrire sur la guerre que l’on ne voit pas mais qui est là comme un spectre.

Avez-vous un autre projet musical en tête ?

Je suis en train de composer un opéra. J’avais cette histoire qui me tenait à cœur : un jeune femme redécouvre la vie de son père et part à la recherche de son frère jumeau. Pour l’instant, j’ai juste écrit quelques chansons.

Infos pratiques

  • Mardi 14 mars à 20h30 à l’espace culturel François-Mitterrand à Canteleu.
  • Tarifs : 13 €, 9 €. Pour les étudiants : carte Culture.
  • Réservation au 02 35 36 95 80.
  • Première partie : Piers Faccini