Rouen, la nuit avec Cacahuète

Dans Blouma, Stany Cambot, un des membres fondateurs d’Échelle inconnue, raconte deux vies parallèles : celles de Cacahuète et de Nono, deux personnages des nuits rouennaises qui manient plusieurs langues. Un film, entre documentaire et fiction, à découvrir sur plusieurs plateformes pendant le confinement.

Il s’appelle Michel Lescarbotte. Beaucoup le connaissent sous le nom de Cacahuète. Un sobriquet qu’on lui a donné dès l’enfance puisque le garçon se débrouillait pour vendre dans la rue des paquets de cacahuètes. La rue, il ne l’a jamais quittée. Surtout la nuit. Il sillonne la ville de Rouen avec un gros bouquet de roses dans un bras. Cacahuète va proposer ses fleurs, sans parfum et aux couleurs trop vives, aux clients des bars, des restaurants et des discothèques. 

Stany Cambot croise Michel Lescarbotte, découvre le personnage, aussi « une histoire, une culture ». Dans ce premier film, tourné en 2013, le cofondateur du collectif Échelle inconnue raconte « l’histoire des invisibles, de ces voyageurs de la nuit », comme Cacahuète. L’homme au physique de boxeur traverse Rouen d’est en ouest, de la Croix de pierre jusqu’aux quais où se tient la foire Saint-Romain, fait des pauses pour retrouver ses copains. Là, on parle le français, le manouche, le verlan, l’argot. « Toutes ces langues se partagent entre eux et cela m’a beaucoup touché ». Le réalisateur va jusqu’à inscrire dans les images les traductions des mots, comme dans un dictionnaire.

Portrait d’une ville

Ces personnages de la nuit discutent pour se donner des nouvelles et se souvenir d’un moment de sa vie ou d’un copain. Dans Blouma (fleur en manouche), Stany Cambot met en parallèle la vie de Cacahuète et celle de Jean Quesnel, dit Nono, décédé juste avant le tournage. C’est Jean-Marc Talbot qui joue le rôle de cet homme « ascendant manque de pot », fasciné par le monde forain, un fan de musique en pleine écriture de ces mémoires. « Il était très influencé par ces auteurs de polars français ». Michel part ainsi sur les traces de cet ami disparu tout en rencontrant des créatures fantastiques.

Fiction ou documentaire ? Stany Cambot n’a pas voulu choisir. « Pour certaines scènes, j’ai laissé faire, discuter. J’ai suivi Michel. Pour d’autres, il y a une reconstitution fictionnelle ». Blouma est également le portrait original d’une ville à un moment où des mondes différents se croisent et font connaissance.

https://www.youtube.com/watch?v=B43IjMbhznU

  • Le film Blouma qui devait être présenté en avant-première le 2 avril à Rouen est visible sur Internet durant toute la durée du confinement