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Steve Bell : « Emmanuel Macron me rappelle Tony Blair »

Il a un trait très personnel, un regard aiguisé sur l’actualité politique et sur tous ceux qui la font. Steve Bell est caricaturiste au Guardian. Il a commencé avec sa célèbre Maggie’s Farm, la ferme de Margaret Thatcher, inspirée de la Ferme des animaux d’Orwell. Dans les pages du quotidien britannique, il ose. Il représente les hommes et les femmes politiques du monde entier dans des situations qui ne sont jamais trop à leur avantage. Si Angela Merkel se retrouve en femme fatale et dominatrice, Donald Trump n’est plus qu’un pot de chambre. Steve Bell a cette particularité : il parvient à déceler des traits de caractère bien cachés des responsables politiques et s’amuse à détourner quelques tableaux classiques bien connus. Ses dessins sont présentés jusqu’au 19 novembre à l’hôtel de ville de Rouen. Une exposition en forme d’amuse-bouche au festival This is England qui se tient  du 14 au 19 novembre.

Quand avez-vous commencé à marier dessin et politique ?

Dans la plupart de mes travaux, j’ai toujours mélangé la politique et le dessin. J’ai commencé ma carrière en dessinant des comics pour les enfants mais je me suis toujours intéressé à la bande dessinée traitant de la politique. Finalement, je me suis débrouillé pour trouver un moyen d’être rémunéré avec cela.

Qu’est-ce qui vous intéresse dans la politique ?

Je ne sais pas. Je trouve tout simplement que la politique est un domaine fascinant et souvent très drôle.

Vous intéressez-vous davantage à la politique ou aux hommes et femmes politiques ?

C’est difficile de dessiner sur la politique d’une manière totalement abstraite. Je dessine tout le temps les hommes et les femmes politiques et je suis souvent personnellement grossier avec eux. Ils ont des habitudes étranges. Je ne pense pas que tous les hommes politiques soient idiots ou corrompus. Certains les sont. Mais je préfère les titiller pour les choses absurdes qu’ils font plutôt que pour leurs manières stupides qu’ils ont.

Avec quel œil regardez-vous les actualités politiques ?

J’espère avec un œil politiquement perçant.

Comment faites-vous pour justement capter les travers des hommes et femmes politiques ?

Je lis les journaux, sur papier et en ligne. J’écoute la radio et je regarde la télévision. J’aime beaucoup aller aux conférences de presse des partis — elles se déroulent chaque année au Royaume-Uni au début de l’automne. Je suis assis dans l’ombre et je les dessine sur place.

Comment faites-vous évoluer vos personnages au fil du temps ?

Il faut du temps pour faire évoluer un personnage. Je fais attention à la manière dont évolue l’image des hommes et des femmes politiques au fil du temps. Certains résistent. D’autres se retirent ou meurent. Là, je dois juste trouver qui prend une nouvelle place.

Plusieurs dessinateurs de Charlie Hebdo ont été assassinés lors d’un attentat. Quelles limites vous fixez-vous ?

J’ai été très choqué et attristé par le massacre à Charlie Hebdo. J’admire ce qu’ils ont fait mais ils ont payé cher cette liberté. Je pense que la caricature au Royaume Uni est plus timorée sur les minorités mais plus virulente sur les autres personnes.

Vous avez représenté Emmanuel Macron en Napoléon. Pourquoi ?

Ce qui m’a frappé c’est qu’Emmanuel Macron est ivre de pouvoir. Il me rappelle Tony Blair — j’ai toujours pensé de lui qu’il était un populiste, un homme de droite, hanté par sa propre jeunesse, sa popularité, la nouveauté. Je ne sais pas encore si Macron ressemble vraiment à Blair. J’espère qu’il n’aura pas autant d’appétit qui le conduira à envahir l’Irak.

 

  • L’exposition est visible jusqu’au 19 novembre, du lundi au vendredi de 8h30 à 16h45 et le samedi de 9 heures à 11h30, à l’hôtel de ville de Rouen. Entrée libre
  • Rencontre avec Steve Bell jeudi 16 novembre à l’Armitière à Rouen. Entrée libre.