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Théâtre au CDN de Normandie Rouen : Pasolini sur un terrain de foot

affabulazionethierrychassepouxIl a été un artiste italien très engagé. Pier Paolo Pasolini, poète et cinéaste assassiné en 1975, fascine toujours autant. Gilles Pastor a mis en scène Affabulazione, un texte dramatique sur lequel plane le spectre de Sophocle. Pasolini évoque la relation entre un père et son fils. Un riche industriel de Milan sort très troublé d’un rêve étrange : il aperçoit les jambes d’un grand et beau jeune homme. Ce sont celles de son garçon. Il s’interroge alors sur sa vie, sur les sentiments éprouvés à l’égard de ce fils. Y a-t-il de la jalousie, de l’attirance, de la répulsion ? C’est un Œdipe à l’envers. Affabulazione est interprété par cinq comédiens et cinq joueurs de football, sans oublier la voix de Jeanne Moreau, jeudi 19 et vendredi 20 mai au CDN de Normandie Rouen. Interview avec Gilles Pastor, metteur en scène de la compagnie Kastôragile.

 

Comment vous êtes-vous reconnu dans ce texte ?

J’ai travaillé souvent sur la figure du père. Jusqu’à présent, il était absent. Dans ce texte de Pasolini, il a une présence énorme. Son rêve prend une toute puissance. Et ce père annule toute vie à l’extérieur, détruit toute la cellule familiale. J’aime ce rapport aux désordres, chez l’homme, à l’intérieur de la société. Dans Affabulazione, il y a un schéma de désordre dans une maison. Pourtant, elle connaît une réussite sociale.

 

Est-ce que ce texte interroge le sens de la paternité ?

Il interroge beaucoup le sens de la paternité. Pasolini n’a pas eu d’enfant. Dans Affabulazione, après son rêve, le père ne veut plus être père alors que cela n’est pas concevable. Il n’est pas possible de revenir au point originel. On peut tuer le fils mais on ne peut pas tuer le père que l’on est devenu.

 

Quel a été votre parti-pris pour la mise en scène ?

Elle est liée au football. Sur scène, il y a cinq comédiens, cinq joueurs de foot et la voix de Jeanne Moreau. Ce sont trois entités qui ont leur sens. C’est une famille décomposée avec autant d’acteurs que de footballeurs. J’ai introduit le spectre de Sophocle qui annonce ce qui va se passer dans la famille.

 

Pourquoi le football ?

Pasolini jouait au foot à Rome. Par ailleurs, il y a dans son écriture quelque chose de musclé, de physique, de sportif. Cela demande à l’acteur une dimension d’incantation et modifie l’appréhension du plateau. Les scènes de football apportent une dimension tragique, mythique à cette famille bourgeoise milanaise.

 

Avec le foot, vous confrontez le rêve au réel.

Oui, avec un côté performatif dans le rapport au texte, au jeu.

 

 

 

  • Jeudi 19 et vendredi 20 mai à 20 heures au théâtre de La Foudre à Petit-Quevilly. Tarifs : 14 €, 9 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 03 29 78 ou sur www.cdn-hautenormandie.fr