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Théâtre au CDN : les élèves du conservatoire jouent à jouer Genet

Trois représentations pour les travaux publics de fin d’année de la classe d’art dramatique du conservatoire de Rouen : les 15 élèves jouent du 28 au 30 juin au CDN de Normandie Rouen un montage de textes de Jean Genet, Le Balcon, Les Paravents, Haute Surveillance et Le Condamné à mort.

« Il faut toujours revisiter les grands ». Dans la liste de ces auteurs essentiels, Maurice Attias a choisi Jean Genet (1910-1986). Pour les travaux de fin d’année de la classe d’art dramatique du conservatoire de Rouen, le professeur et metteur en scène a réuni des textes sur le pouvoir. Au Condamné à mort, fil rouge de cette pièce jouée du 28 au 30 juin au CDN de Normandie Rouen, il ajoute Le Balcon, Haute Surveillance et Les Paravents.

Les 15 apprentis comédiens sont tous les détenus d’une prison où ils organisent une réelle révolte. Dans un centre pénitentiaire, il ne peut y avoir un choeur parce que chacun porte en lui une colère profonde, intime. Dans ses écrits, Jean Genet n’a lancé que des cris de révolte, dessiné un monde de violence. « Il n’a jamais éprouvé ce sentiment de légitimité », rappelle le metteur en scène. Genet, enfant abandonné et confié à une famille dans le Morvan, un homme fragile, a mené une vie ponctuée de resquilles, de vols et de séjours en prison. « Il a tout le temps volé des livres. Il passait ses journée à lire, à méditer. Il disait : je n’étais en prison que pour écrire. Toute sa vie, il a vécu dans la grande misère mais en toute liberté ».

Un théâtre radical

Pour les apprentis comédiens du conservatoire, la difficulté réside dans l’appropriation de la langue de Genet qui peut être d’une étonnante brutalité. « Au début, j’avoue, je ne comprenais rien. Il a fallu que je mette tout cela en bouche. Chez Genet, il y a un refus total de bonheur, de douceur, de l’arrangement avec le monde tel qu’il est. En fait, il a fallu comprendre sa vie pour comprendre ses textes. Aujourd’hui, c’est très agréable à dire. C’est une langue très vivante », constate Clémence Ardoin, une des 15 élèves.

Avec Genet, on est dans un théâtre de la radicalité. L’auteur des Bonnes casse les cellules qui fondent la société, comme la famille et les instances de pouvoir. Pour s’échapper de ce monde, il n’y a plus que le jeu. Et « tout est prétexte au jeu », remarque Maurice Attias. Un jeu qui doit aller jusqu’à la caricature et «  donne à voir. Nous sommes dans un théâtre de célébration. Parce qu’il est faux, il peut prétendre à raconter les choses du monde ». Alors, sur scène, chacun doit trouver son personnage, développer un rôle. « Chacun joue à jouer ».

Ces travaux publics sont l’examen de fin d’année des trois niveaux de la classe d’art dramatique. C’est aussi le moment durant lequel chacun doit se prendre en charge. « Chaque année, je fais en sorte que la classe soit en autonomie. C’est important pour leurs futurs projets », commente Maurice Attias.

Dans ce spectacle, l’enseignant est assisté à la mise en scène de Clémence Ardoin. « C’est moi qui fait la demande. Je me suis lancée un défi. Ce n’est pas dans ma nature de gérer les choses. C’est une manière pour moi de grandir, de gagner en maturité, en confiance aussi. C’est un rôle supplémentaire ». Autre rôle également pour Clémence Ardoin : elle jouera dans  Peer Gynt d’Ibsen, mis en scène par David Bobée, directeur du CDN de Normandie Rouen.

  • Mercredi 28, jeudi 29 et vendredi 30 juin à 19 heures au théâtre des Deux-Rives à Rouen. Spectacle gratuit. Réservation au 02 35 70 22 82 ou sur www.cdn-normandierouen.fr