Gaz Coombes, gentleman rocker

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Aussi talentueux que généreux, Gaz Coombes impose sa classe et sa bouille de beau gosse depuis trente ans avec d’abord Supergrass, puis avec Hotrats et maintenant en solo. Le génial chanteur britannique s’installe au 106 à Rouen mercredi 25 octobre pour jouer son dernier superbe album, Turn The Car Around.

En plein cœur des heures glorieuses de la britpop, un super groupe pointait son nez. Plus nerveux et plus élaboré. Plus fun aussi, Supergrass cassait l’image nonchalante et franchement condescendante des poids lourds du genre – excepté peut-être Blur. À la tête de ce brillant trio, Gaz Coombes s’imposait très vite comme un chanteur et un guitariste au potentiel énorme. L’avenir lui donnera raison et Supergrass enchaînera les succès jusqu’à sa presque-séparation en 2010 puisque le combo revient depuis sur scène de manière sporadique.

Gaz Coombes poursuit maintenant sa route en solo ou plutôt avec d’autres musiciens mais sous son propre nom. Il enchaîne les tournées et les albums dont le récent Turn The Car Around qu’il vient jouer en partie au 106 à Rouen, mercredi 25 octobre. Et la flamme n’est pas prête de s’éteindre… Le gamin de l’époque Alright a certes pris de la bouteille mais conserve un sens inné de la mélodie et une aisance scénique des plus évidentes. 

C’est affublé d’un chapeau large (ou d’une casquette ou d’un béret selon les jours) et d’une barbe fournie – quelque part entre le hobo et le bûcheron canadien – qu’il se présente aujourd’hui du haut de ses 47 ans. Plus posé, plus mature bien sûr, Gaz Coombes se sent surtout plus détendu, libéré de la pression imposée par le marché et de la nécessité de fournir du single en veux-tu, en voilà. Sa carrière solo a pris une forme différente, en particulier son aspect créatif. L’artiste élabore ses titres chez lui, dans son studio d’Oxford, construit en 2020 pendant la période de pandémie et de confinements successifs. Il joue et enregistre la plupart des instruments lui-même, prend le temps de fignoler et recherche des textures sonores qui ne correspondent pas forcément aux codes de la production actuelle.

C’est particulièrement le cas sur son quatrième album, Turn The Car Around , qui offre un panel intéressant de détails sonores. On y entend des références aux années 1960 comme une batterie sans compression, d’autres plus estampillées 1980 par l’utilisation de synthétiseurs inhérents à cette époque, enfin des ambiances folk qui correspondant à des sensations personnelles, à une volonté de sortir des carcans de la mode.

L’ex-leader de Supergrass prend son temps et son dernier opus a mis sept ans à voir le jour. Certaines chansons avaient été maquettées à l’époque de l’enregistrement du précédent opus et ont maturé dans l’esprit raffiné du compositeur. Don’t Say It Over en est la plus belle illustration. Une pop song délicate et vertigineuse, sombre et lumineuse. Le songwriter cultive le paradoxe à volonté et aime jongler avec les opposés, notamment l’ombre et la lumière, thèmes récurrents dans ses chansons. Il parle de lui, de sa mère décédée il y a quinze ans dans le titre éponyme et se demande ce qu’elle penserait de cette période compliquée que connaît la Grande-Bretagne : Covid, Brexit, crise économique et sociale, etc. Des questionnements qui cherchent des réponses mais le chanteur n’en trouve pas toujours. Malgré ses particularités et ses ambiances changeantes, l’album se montre cohérent et élégant, soigné et émotionnellement riche. 

Restait en suspend la question du live ? Comment transformer cet essai discographique en format concert ? Le challenge s’annonçait périlleux mais les retours sur les premiers concerts de la tournée confirment que Gaz et ses cinq musiciens restituent parfaitement l’ambiance de Turn The Car Around. Les arrangements ont été allégés mais l’essentiel est bien là. Les réminiscences au glam rock, les clins d’œil au rock psychédélique, les douceurs folk… tout est présent, et bien sûr, son atout majeur, cette voix magnifique et précise, subtile et sensible. Le plaisir absolu pour les oreilles. Comme il l’a souvent dit, Gaz Coombes aime la France : il séjourne souvent à Paris où l’un de ses frères réside, et possède une maison familiale dans l’Eure… Et il adore le public français. Alors il ne reste qu’à lui rendre tout cet amour mercredi soir. 

Infos pratiques

  • Mercredi 25 octobre à 20 heures au 106 à Rouen
  • Première partie : Ralfe Band
  • Tarifs : de 25 à 8 €. Pour les étudiants : carte Culture.
  • Réservation au 02 32 10 88 60 ou sur www.le106.com
  • Aller au concert en transport en commun avec le réseau Astuce