Cosmic rocker

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Sortez les platform boots, les cols échancrés et les moule-burnes colorés à pattes d’eph… Le glam-rock est de retour au 106 à Rouen vendredi 6 février avec Gyasi, nouvelle icône du genre, qui sera en concert lors de la dernière Nuit de l’Alligator.  

A l’heure ou les non genrés s’affirment à tout-va, il est bon de rappeler que les glamour-boys s’amusaient avec les codes sexuels à l’aube des seventies. Bien sûr, la finalité n’était pas la même mais les hommes montraient déjà leur part de féminité et les femmes se masculinisaient sans tabous, sans peur des réactions des puritains et autres conservateurs. Marc Bolan du groupe T-Rex tripotait son boa emplumé avec délicatesse, Todd Rundgren se grimait à l’extrême, David Bowie et Ziggy Stardust ne faisaient qu’un, et, moulée dans une combinaison en latex, Suzi Quatro faisait fantasmer tous les masochistes qui ne rêvaient que d’être fessés par cette « maîtresse » sexy et dominatrice.

Le glam-rock envahissait le quotidien des Britanniques, partagés entre étonnement, admiration et rejet. L’histoire n’a pas duré très longtemps mais suffisamment pour marquer les esprits et être aujourd’hui répétée par une nouvelle génération d’artistes plutôt fidèles à la version originale. C’est le cas de Gyasi, (prononcé Jah-See), groupe mené par le charismatique chanteur et guitariste Gyasi Heus qui débarque à Rouen pour enflammer le 106, dans le cadre du troisième round du festival Les Nuits de l’Alligator, vendredi 9 février. 

Drôle d’oiseau que cet emplumé, pailleté et maquillé à outrance, qui se présente en digne héritier des grands noms du glam-rock. Pourtant, l’histoire n’était pas gagnée d’avance pour lui. Le gamin a grandi dans une sorte de ferme au beau milieu de sa Virginie-Occidentale natale, un état des plus ruraux qui abrite un royaume de péquenots plus concernés par les forêts montagneuses que les mégalopoles. Mais ses parents, probablement des hippies égarés, le mettent à la batterie à l’âge de 4 ans et lui achètent une guitare pour ses 6 ans. C’est la révélation.

Gyasi se nourrit des vinyles de la famille, écoute les monuments du rock et du blues, de Led Zeppelin à Robert Johnson, de Jimi Hendrix à Howlin Wolf, de Lou Reed à John Lennon… tous tournent à profusion pendant des années. L’ado digère, copie et compose ses premières chansons. Il affine et affirme son écriture vers 18 ans. Son parcours musical passe par le Berklee Collège of Music de Boston où il perfectionne sa technique mais ne trouve toujours pas sa voie artistique malgré des expériences au sein de divers groupes.

Impossible de choisir entre tous les styles qu’il apprécie. Les bands se succèdent mais rien de cohérent à ses yeux n’en sort. Comme le dit le proverbe : « On n’est jamais mieux servi que par soi-même », et Gaysi s’achète un home-studio huit pistes et l’installe dans la ferme familiale pour enregistrer son premier EP où il joue presque tous les instruments. Le résultat le satisfait. Il a enfin pu donner libre cours à sa créativité. Les titres reçoivent un bon accueil des radios et le pousse à déménager à Nashville où la musique coule à flot, et surtout où les loyers sont moins élevés qu’à New York ou à Los Angeles. Deux bonnes raisons pour y vivre et y entamer un projet musical plus sérieux. 

Les musiciens sont recrutés, le groupe fonctionne à merveille et Gyasi cultive l’imagerie glam. En bon Américain, il imprègne sa musique de blues, de passages d’harmonica, de riffs piquants même si ses goûts portent pour la plupart vers les perles britanniques de la fin des années 1960 et du début 1970, une période rêvée à travers ses héros, avec Robert Plant en maître absolu (même si la similitude vocale est plus évidente avec Marc Bolan).

En plus d’admirer le leader de Led Zep, l’extravagant Gyasi partage avec le guitariste Jimmy Page un amour immodéré pour les solos de guitare. Sur disque ou en concert, les deux six cordes du groupe se tirent la bourre en hurlant des aigus indicibles. Des sons venus d’ailleurs tout comme cet extra-terrestre aux cheveux longs décolorés qui semble arrivé d’un monde lointain, révolu, où le rock’n’roll était roi. Un ET 2024 qui va en surprendre plus d’un, plus d’une, et pas seulement à cause de cette androgynie qu’il cultive à souhait. Sa capacité à séduire est indéniable et ses atouts sont nombreux : chanteur, multi-instrumentiste, comédien, poète, soliste, passionné, inspiré et, bien sûr, flamboyant comme tout bon activiste du glam-rock.

Infos pratiques

  • Vendredi 9 février à 20 heures au 106 à Rouen
  • Première partie : Les Courettes
  • Tarifs : de 19 à 4 €. Pour les étudiants : carte Culture
  • Réservation au 02 32 10 88 60 ou sur www.le106.com
  • Aller au concert en transport en commun avec le réseau Astuce