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Tosca, la rebelle

photo Arnaud Bertereau

David Bobée avait prévenu. Sa lecture de Tosca sera très politique. Et elle l’est.. Loin de tout romantisme, le metteur en scène, directeur du CDN de Normandie, a imaginé un spectacle à la fois bouleversant et saisissant, porté par de magnifiques interprètes. L’œuvre de Puccini se joue mardi 10 et jeudi 12 mars à l’Opéra de Rouen Normandie, puis en juin au Théâtre de Caen.

Jamais, elle ne chutera. Floria Tosca est une femme amoureuse — même jalousement amoureuse. Elle est surtout une artiste qui défend la liberté de créer et qui veut résister à tout pouvoir totalitaire. En ces temps si sombres, ce n’est pas simple pour une femme, aussi forte soit-elle. Aujourd’hui, elle renvoie à la citation de Simone de Beauvoir : « n’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question ». 

Tosca (sublime Latonia Moore) est la première victime de l’odieux Scarpia (Kostas Smoriginas, froid et sexy). Entouré de ces hommes et femmes de mains, le chef de la police se place en maître du jeu et veut imposer la terreur. Connaissant sa jalousie maladive, il va commencer par manipuler la cantatrice afin de retrouver son amant, Mario Cavaradossi (Andrea Carè, doux et amoureux). Un républicain convaincu, qui cache dans sa villa Cesare Angelotti, prisonnier politique. Il va ensuite l’inciter à venir dans son antre pour lui proposer un marché : son corps contre la vie de Mario en pleine séance de torture.

Un monde en ruine

Tosca va se donner à Scarpia, cet homme froid qui tend néanmoins à vaciller quand il brûle de désir pour elle. La cantatrice veut sauver son amoureux et aussi l’artiste. En temps de crise, les femmes sont en effet les victimes ; tout comme l’art. Scarpia n’hésite pas à persécuter les artistes, imposer une censure. Il ne supporte pas les toiles modernes de Cavaradossi, d’immenses portraits d’une Marie-Madeleine à l’âme profondément meurtrie exposés dans cette imposante église désacralisée. Scarpia va lacérer l’un d’eux avant de réunir tous les tableaux qui finiront dans les flammes.

C’est tout le propos de David Bobée qui ne va rien suggérer. Défendre toute forme de libertés, lutter contre la domination masculine font partie des combats depuis toujours du metteur en scène qui montre la violence. Celle de ce coup de canif dans le visage peint par Mario Cavaradossi. Celle de l’autodafé. Celle aussi du viol de Tosca par Scarpia. Celle encore de l’exécution du peintre par les sbires du chef de la police qui pointent en même temps leur arme vers le public. Face à ces douleurs, Tosca ne chutera jamais dans ce monde en ruine. Elle résistera. Même dans la mort. Elle s’envolera.

photo Arnaud Bertereau

Infos pratiques

  • Mardi 10 et jeudi 12 mars à 20 heures au Théâtre des Arts à Rouen. Introduction à l’œuvre une heure avant la représentation
  • Dimanche 14 juin à 17 heures, mardi 16 et jeudi 18 juin à 20 heures au Théâtre de Caen. Tarifs : de 60 à 10 €. Réservation au 02 31 30 48 00 ou sur www.theatre.caen.fr