Au Havre, les œuvres apparaissent comme des mirages

photo : Jacques Basile

L’illusion est le thème de ce nouvel Été au Havre qui se déroule jusqu’au 19 septembre. Il faut bien ouvrir les yeux pour découvrir les sept nouvelles œuvres et une recréation, installées en divers espaces de la ville. Elles apparaissent comme des mirages.

Pierre Delavie : Que Justice soit fête

Avec Pierre Delavie, il faut douter, ne pas croire tout ce que l’on nous montre. Que Justice soit fête est un trompe-l’œil. Il a reproduit la façade du palais de justice sur de grands panneaux qu’il a accrochés entre les piliers. Il rappelle non seulement que cette bâtisse à des allures de temple grec mais aussi que la justice est un chemin infini dans cette mise en abyme. Il y ajoute deux sculptures, une femme et un homme, les mains vides, symboles d’une impartialité.

  • Au palais de justice, boulevard de Strasbourg

Fabio Viale

Fabio Viale est un artiste rare en France. Avec le marbre, son matériau de prédilection, il reproduit les sculptures les plus connues de la Grèce antique. Pas seulement à l’identique. Il travaille le marbre pour lui donner l’aspect de la peau. Puis il ose une transgression : il les couvre de tatouages, très codifiés. Certaines œuvres sont recouvertes de dessins des Yakuza japonais, d’autres portent des tatoos de criminels. La prouesse réside dans le réalisme du geste. Fabio Viale dresse une passerelle entre l’Antiquité et le monde contemporain, le sacré et le profane, les différentes conceptions de la beauté. Le résultat est saisissant et émouvant.

  • À la Villa maritime, boulevard Albert Ier

Arthur Gosse : La Lune s’est posée au Havre

Tout est dit dans le titre de l’œuvre : La Lune s’est posée au Havre. Elle est au milieu d’une mare et de la végétation dans le square Roch. Arthur Gosse, étudiant à l’ESADHaR (école supérieure d’art et de design LeHavre-Rouen), a fabriqué cette grande sphère ronde et grise, avec tous ses cratères, selon les plans de la NASA. Sur Terre, la lune a un étonnant pouvoir d’attraction.

  • Au square Roch

Patrick Murphy : Sentiment d‘appartenance (à tout oiseau son nid est beau)

Sont-ils vrais ou faux ? C’est la question qui se pose quand on est face à la tour de l’hôtel de ville.  200 goélands ont pris place, voire envahi la terrasse et les rebords des fenêtres. L’artiste les a imaginés dans plusieurs positions et leur a donné une fierté allure. L’illusion est réussie. Patrick Murphy interroge avec cette installation monumentale la question de la cohabitation entre les humains et les oiseaux

  • À l’Hôtel de Ville

Fabien Mérelle : Jusqu’au bout du monde

L’œuvre de Fabien Mérelle, vandalisée le 4 mai 2020, a été reconstruite et trouve une place dans la cathédrale du Havre de manière provisoire. Jusqu’au bout du monde est cette immense sculpture de 6,24 mètres avec ce père, vêtu d’un pyjama, portant sa fille sur ses épaules. Sur la plage, elle invitait à regarder vers l’horizon. Dans l’édifice religieux, elle prend un autre sens, notamment près de la Vierge enlaçant son fils.

  • À la cathédrale

Pierre Delavie : Down John

Effet garanti ! Un cargo semble être encastré dans un hangar sur le port du Havre. C’est un trompe-l’œil de Pierre Delavie. L’artiste a imaginé cette œuvre en pensant à ces bateaux qui patientent au large en attendant le cours le plus favorable à la bourse pour entrer dans le port. Une manière de procéder qui a chagriné Pierre Delavie. Down John est une référence au down jones, indicateur de la bourse de New York et à ce cargo barrant le canal de Suez.

  • Depuis le quai Southampton

Chiki : Fata Morgana

Un palmier est apparu au milieu du bunker à l’extrémité de la digue sud, un lieu inaccessible. Il offre l’illusion d’un paysage méditerranéen, d’une médina, d’un oasis. Comme si la fée Morgane avait eu le pouvoir magique de transformer cet endroit chargé d’une histoire tragique en un havre de paix. Fata Morgana crée un réel trouble.

  • Face au Muma

Hehe : Gold Coast

Helen Evans et Heiko Hansen, deux artistes travaillant au Havre, ont recouvert d’une feuille d’or six énormes pierres servant à l’enrochement du terre-plein de la jetée et à la protection du rivage. Sensibles aux problématiques sociales et écologiques, ils font de cet espace a priori banal et dénué de charme un patrimoine précieux et renvoient à l’activité économique portuaire fructueuse. Comme si cette richesse pouvait être infinie. Le soleil et le ciel donnent à ces pierres précieuses différentes teintes, nuances et reflets selon les jours et le moments de la journée.

  • Face au MuMa

Infos pratiques

  • Jusqu’au 19 septembre au Havre
  • Parcours fléchés au sol dans toute la ville, du palais de justice jusqu’à la plage en passant par l’hôtel de ville et le square Roch
  • Gratuit
  • photos : Arnaud Tinel sauf Down John et Jusqu’au bout du monde, Jacques Basile