Riff Reb’s : « Stevenson a inventé l’horreur en littérature »

photo : R. Meigneux

Le dessinateur havrais revient avec une nouvelle bordée de pirates. Tempête de dessins pour illustrer un grand classique du genre qui bénéficie pour l’occasion d’une nouvelle traduction. Quand Riff Reb’s se lance à la conquête de L’Île au trésor (Ed. Daniel Maghen), c’est puissant. Le dessinateur est en dédicace vendredi 2 décembre à La Galerne au Havre, samedi 18 décembre au Grand Nulle Part à Rouen. Entretien.

Vous avez déjà beaucoup « pratiqué » la piraterie dans vos livres. Il était étonnant qu’il n’y ait pas déjà eu L’Île au trésor parmi eux…

J’ai souvent eu des sollicitations : « Quand vas-tu faire l’Île au trésor ? » Et je répondais toujours : « jamais ! ». J’avais toujours quelque chose d’autre de plus important à faire. Et il est vrai que j’avais déjà beaucoup fait dans le « maritime ». C’est pendant le confinement que j’ai commencé à travailler là-dessus. J’en ai parlé à Daniel Maghen qui m’a dit qu’il était intéressé pour publier la version intégrale.

Le livre de Stevenson a déjà été confié à de grands illustrateurs. Est-ce compliqué de passer après ?

Après Beuville qui a fait une jolie version, Joubert ou encore Ralph Steadman, c’est sûr : c’est un défi. Mais au moins, j’ai fait beaucoup de dessins, des grands, des petits, des culs-de-lampe… Pratiquement un à chaque fois que l’on tourne une page ! L’idée, c’est justement que le lecteur n’échappe jamais au dessin…

On sent que vous aimez dessiner les pirates…

L’avantage, c’est que le costume fait le personnage, avec un côté caricature et excès que j’aime bien. Mais c’est surtout le bateau qui est intéressant dans le sens où se joue là un huis clos sur l’eau ; comme au théâtre. Cela rend toutes les confrontations possibles…

Vos pirates sont à la fois amusants et terrifiants…

C’est l’auteur qui l’a voulu. Stevenson a inventé l’horreur en littérature. Quand vous lisez L’Île au trésor, ce n’est que tragédies, vexations, humiliations. Tout est monstrueux. Un cauchemar ! Je ne devais donc pas édulcorer mon dessin.

Et votre style colle parfaitement au celui de Stevenson…

Le dessin est important mais il faut avant tout qu’il fasse écho au texte. Je ne cherche pas précisément à dessiner dans une catégorie. Mais bon, je suis plutôt semi-réaliste. Cela n’existe pas vraiment en BD. On fait Astérix ou Blueberry. Mais un Gaston Lagaffe qui risquerait de mourir, c’est compliqué. Il faut choisir son camp ! Moi, j’ai toujours voulu pousser vers la caricature. Même pour des sujets sérieux.

On sent une filiation avec Will Eisner (à qui l’on doit The Spirit, notamment). Mais quelles sont vos – autres – « idoles » ?

Gustave Doré et Daumier, bien sûr. Le Russe Repin. Mais aussi Franquin et Gotlib. Forcément.

En 40 ans de carrière, votre style a-t-il évolué ?

Il y a eu logiquement une évolution. Je ne le vois pas précisément mais cela ressort lors des expos. Encore une fois, c’est le scénario qui commande.

Vous avez une chance formidable : vous dessinez face à la mer…

C’est l’avantage d’être havrais ! Par contre, avec toute cette lumière, pour dessiner, je suis obligé de tirer les rideaux…

Propos recueillis par Hervé Debruyne

Infos pratiques

  • Vendredi 2 décembre à 17 heures à La Galerne au Havre
  • Samedi 18 décembre à 15 heures au Grand Nulle Part à Rouen
  • Entrée gratuite