Il y a eu une grande production photographique au Havre dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Le MuMa raconte un pan de cette histoire à travers 200 œuvres réunies dans cette exposition, Photographier en Normandie 1840-1890, et présentées jusqu’au 22 septembre pendant Normandie impressionniste.
Pourquoi proposer une exposition photographique au Havre, au MuMa ? Il y a en fait une réelle logique. Tout d’abord, « elle s’inscrit dans l’histoire du musée et de ses collections », rappelle Géraldine Lefebvre, directrice du lieu. Le MuMa possède en effet un fonds important de photographies grâce aux différentes campagnes menées sur la reconstruction du Havre après 1947 et à l’intérêt porté à ce médium au fil des décennies.
Autre raison : l’histoire de la photographie en Normandie. « C’est l’endroit photographique par excellence. Il est proche de Paris, possède de nombreux sites patrimoniaux et naturels. Tous les plus grands photographes de l’époque sont passés en Normandie », remarque Sylvie Aubenas, conservatrice générale et directrice du département des estampes et de la photographie à la Bibliothèque nationale de France. La région, notamment Le Havre, a ainsi été un terrain d’expérimentation pour les artistes. Plusieurs d’entre eux ont installé leur chambre photographique à l’endroit même où a été construit le musée.
Des images inédites
Présentée jusqu’au 22 septembre, cette passionnante exposition, Photographier La Normandie 1840-1890, retrace une évolution des techniques, traverse divers sujets et tisse un lien avec le travail des peintres de cette époque. Et ce avec pas moins de 200 œuvres dont de magnifiques daguerréotypes et des images inédites. 1840, c’est donc le début de cette histoire. Cette année-là, durant l’été, Hippolyte Fizeau (1819-1896), physicien qui parvient à calculer la vitesse de la lumière, va au Havre et en réalise les tout premiers daguerréotypes. Il y a huit vues dont celle, d’une grande précision, du bassin du Roi depuis l’hôtel du Brésil.
Les passionnés de la photographie n’hésitent pas à partager leurs trouvailles. Lors des balbutiements, il a fallu surmonter quelques obstacles, comme le temps de pose. Les frères Macaire, Hyppolyte (1804-1852) et Louis Cyrius (1807-1871), eux, refusent de divulguer leur secret après avoir réussi un portrait en moins d’une seconde. Ils l’ont regretté.
Des sujets récurrents
Autre grand nom de la photographie : Gustave Le Gray (1820-1884). Non seulement il a découvert plusieurs procédés (le négatif sur papier ciré, le négatif sur verre au collodion), mais il a eu une approche picturale du médium. « Il va s’attaquer au thème de la marine. Il le prend de manière frontale avec des petits et des grands formats. Avec lui, on peut voir un soleil en face, en contre-jour, un bateau en mouvement, les effets du soleil sur la mer ou de la nuit en plein jour. Il fait ce qu’il veut », commente Sylvie Aubenas.
La co-commissaire de l’exposition explique le succès de Gustave Le Gray :
L’affiche de l’exposition est un tirage de Gustave Le Gray. Benoît Eliot, éditeur, designer graphique et photographe, co-commissaire, décrit Musée-bibliothèque et ville du Havre, 1856, sur papier albuminé d’après négatif sur verre au collodion, conservé à la bibliothèque municipale du Havre :
Point de départ de Photographier La Normandie 1840-1890 : au Havre, sur la jetée nord avec l’entrée et la sortie des bateaux. Les photographes sont aussi face à la mer pour en montrer ses caprices, sur la plage pour capter des scènes de la vie balnéaire, dans les ports avec leurs activités. Ils s’intéressent également aux monuments les plus connus de la région, aux lieux les plus pittoresques, aux foules lors de marchés ou de commémoration, aux différents travaux. Sans oublier les portraits dont celui de Victor Hugo, dans une attitude peu habituelle, et de son fils François-Victor ou encore celui de Rose Anaïs, une héroïne de Charles Gombert.
L’exposition instaure un dialogue entre photographies et peintures. Bayard, Ruskin, Le Secq Des Tournelles, Coulon, Le Gray, Fizeau côtoient Monet, Pissarro, Courbet, Manet, Boudin… Tous se sont nourris mutuellement et ont étudié les mêmes sujets. De plus, la précision de la photographie a été tel un aide-mémoire pour les peintres.
Infos pratiques
- Jusqu’au 22 septembre, du mardi au vendredi de 11 heures à 18 heures, les samedi et dimanche de 11 heures à 19 heures, au MuMa au Havre
- Tarifs : 10 €, 6 €, gratuit pour les personnes de moins de 26 ans, les demandeurs d’emploi et bénéficiaires de minima sociaux, pour tous le premier samedi de chaque mois
- Renseignements au 02 35 19 62 62 ou sur www.muma-lehavre.fr