Pour son troisième film, Mikado, dans les salles de cinéma à partir du mercredi 9 avril, Baya Kasmi s’intéresse à la première fois où, dans une famille, une enfant cherche à prendre ses distances avec ses parents.
On aime tous les films de Baya Kasmi. Ceux qu’elle a écrits avec son compagnon Michel Leclerc et qu’il a mis en scène — notons leur César du Meilleur scénario original en 2020 pour Le Nom des gens — , et puis ceux qu’elle a réalisés comme Mikado, son petit dernier, mais aussi Je suis à vous tout de suite, son tout premier, et surtout le délicieux Youssef Salem a du succès.
Scénariste engagée qui s’intéresse depuis toujours à la place des femmes dans la société et plus globalement à l’identité et à l’immigration, Baya Kasmi se préoccupe cette fois-ci de la place de l’enfant au sein de sa propre famille. Mais pas question de choisir une famille ordinaire. Y en a-t-il d’ailleurs? Celle que composent le père, Mikado (Félix Moati), alias Michael, la mère, Laetitia (Viala Pons) et leurs deux enfants, est des plus marginale : elle ne tient pas en place, habite dans un camping-car, vivote d’un point à un autre, évitant les axes principaux et se tenant à carreaux lorsque la maréchaussée intervient.
Un jour, Mikado vient en aide à Vincent (Ramzy Bedia), un prof en panne de voiture et ça tombe bien car c’est au tour du moteur de Mikado de leur jouer des siennes. En attendant la pièce de rechange, Vincent et sa fille Théa (Saül Benchetrit) accueillent la petite famille dans le jardin de leur maison cossue.
Pour le meilleur…
Cette rencontre entre une famille monoparentale bourgeoise et une famille bohème, tout comme la parenthèse enchantée qu’elle génère, seront déterminantes pour l’avenir de Mikado et des siens. Si le petit Zéphyr (Louis Obry) suit sans souci ses parents dans leur fuite incessante, Nuage (Patience Munchenbach), l’aînée, en découvrant le collège avec Théa, aimerait bien trouver un peu de normalité dans sa vie au grand dam de son père qui craint de la perdre.
Baya Kasmi a bien choisi sa famille : Felix Moati est parfait en père écorché vif par une enfance entre foyers et familles d’accueil rarement bienveillantes ; Viala Pons, en mère généreuse, apporte amour et légèreté nécessaires à contenir le côté tyrannique de son compagnon et à maintenir l’équilibre parmi les siens ; Ramzy Bedia joue avec sobriété le témoin qui observe avec philosophie mais qui n’hésite pas à donner un coup de pouce à la jeune Nuage.
Avec subtilité, Baya Kasmi met en perspective l’enfance des parents avec celle de Nuage et Zéphyr. Et quand deux enfants blessés deviennent parents, s’ils veillent sur leurs petits avec le plus grand soin, ce n’est pas toujours pour le meilleur. Dans la famille de Mikado, il est peut-être temps pour Nuage de se retirer du jeu et de prendre son envol sans faire de mal aux autres.
Ne ratez pas Mikado, un film porté par l’amour et l’humanité.
- Mikado de Baya Kasmi (France, 1h34) avec Félix Moati, Vimala Pons, Ramzy Bedia, Patience Munchenbach…