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10 ans pour HF Normandie et toujours autant de combats à mener

HF Normandie a 10 ans. Une décennie pour un groupe de six bénévoles qui porte avec une grande force la parité entre les hommes et les femmes dans le monde de la culture, peu exemplaire.

HF Normandie a 10 ans. Fêter un anniversaire est le plus souvent joyeux or celui-ci fait des grincer des dents. « Comme pour les Restos du cœur. Ça n’avance pas. La question de la parité n’est pas réglée », rappelle Anne-Sophie Pauchet, comédienne, metteuse en scène, cofondatrice de la compagnie Akté et membre de l’association. La bonne nouvelle : « nous tenons. Nous restons mobilisés pour informer et donner des pistes de travail », ajoute José Sagit, le seul homme du groupe de HF Normandie.

Ce fut dix ans de lutte acharnée, de réflexions et d’actions, notamment les Journées du Matrimoine, pour obtenir la parité entre les hommes et les femmes dans le secteur de la culture. Faudra-t-il encore une décennie pour tendre vers une égalité ? Peut-être, voire davantage. Les derniers chiffres des nominations à la direction d’un établissement labellisé, publiés par le ministère de la Culture, sont alarmants. Entre le 1er juillet 2020 et le 3 mars 2020, il y a eu un changement de direction dans 16 lieux, un dans un théâtre national, sept dans un centre dramatique national et huit dans une scène nationale. Seules cinq femmes ont été nommées contre onze hommes.

Un auteur, une autrice

Anne-Sophie Pauchet et José Sagit reconnaissent une légère avancée. Il y a tout d’abord le langage avec la féminisation de noms, disparues au fil des années. « Le terme autrice sur lequel nous avons beaucoup travaillé est enfin employé. Il y a deux ou trois ans, c’était impossible ». S’ajoute « une certaine prise de conscience. Nous sommes sortis de cette image où on nous regardait comme les féministes de service avec une forme de condescendance. C’est plus agréable parce qu’il y a une réelle légitimité », indique la metteuse en scène. Ce petit pas en avant n’est pas véritablement suivi des faits. « Nous sommes dans une illusion, remarque José Sagit. Il suffit de lire le dernier document écrit par HF Auvergne-Rhône-Alpes. Certains disent : tout va bien parce qu’il y a HF. Mais ce n’est pas vrai. Notre visibilité n’est pas le reflet de la réalité. En terme d’obligation chiffrée, on est loin du compte ».

Que manque-t-il alors pour inverser les tendance ? « Une volonté politique » selon les deux membres de l’association. « Notre ministère de tutelle est en dessous de tout, selon José Sagit. Nous n’avons pas eu de rendez-vous avec les ministres, juste avec une personne du cabinet. Même au ministère, les femmes sont peu présentes. À la DRAC de Normandie (direction régionale des affaires culturelles, ndlr), c’est une catastrophe. Il n’y a pas d’interlocuteur. Pourtant, il y a une feuille de route. Il faut l’appliquer. C’est a priori compliqué d’imposer et nous n’en voyons pas la bonne raison ».

La Normandie, dans la moyenne

En ce qui concerne les programmations des lieux culturels, « cela repose beaucoup sur des volontés personnelles et individuelles ». José Sagit cite en exemple les saisons du CDN de Normandie Rouen, dirigé jusqu’en mars 2021 par David Bobée. « Il a été un allié. Il s’est rendu à l’évidence : il est possible d’avoir une programmation de qualité avec une parité et de donner autant de moyens de productions aux femmes qu’aux hommes. Cela a amené une dynamique ».

La Normandie ne fait pas mieux ou moins bien que les autres régions de France. « Elle est dans la moyenne ». Il est désormais urgent d’effectuer une étude afin d’avoir une photographie de la région en terme de parité. D’autant que la dernière date de 2015. Les six membres de HF Normandie, lancé à Rouen, souhaite s’étendre dans toute la région, fédérer les différentes initiatives et construire un réseau. « Nous avons besoin de relais. Il est nécessaire que notre parole soit relayée ».

Outre le travail mené dans l’ombre et avec force par ces six bénévoles, il y a un événement fédérateur. Les Journées du Matrimoine présentent une série de propositions pluridisciplinaires mettant en lumière les femmes artistes. Pour la prochaine édition qui se déroulera du 16 au 19 septembre 2021, l’association a reçu plus de 150 projets. Un record !