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Avec Molière, les femmes prennent « le risque de la vie »

Photo : Jean-Christophe Bardot

Il est question d’amour et de liberté dans L’École des maris. Molière se moque de la goujaterie des hommes dans cette pièce créée en 1661. Alain Batis la met en scène pour en révéler toute la modernité. La Mandarine blanche la joue les 8 et 9 décembre à l’espace Marc-Sangnier à Mont-Saint-Aignan avec le CDN de Normandie-Rouen.

Dans L’École des maris, Molière fait triompher l’amour. Deux frères ont en charge l’éducation de deux sœurs. Soit, ils les épousent, soit ils leur trouvent un mari. Si l’un, Ariste, se montre plus à l’écoute, tolérant et enclin à accorder quelques libertés à Léonor, l’autre, Sganarelle, se révèle être un véritable goujat et un tyran jaloux avec Isabelle. Comme il refuse qu’elle noue tout contact avec d’autres personnes, il ne va pas hésiter à l’enfermer. Ce qu’il ignore, c’est qu’Isabelle et Valère sont tombés amoureux l’un de l’autre et les deux amants vont mettre en place une stratégie pour se retrouver et se marier. Et ce, sous les yeux d’un Sganarelle, complètement ridicule.

Alain Batis a été Sganarelle dans une création de René Loyon, présentée en 1999 lors des Rencontres internationales de théâtre en Corse. « Ce fut une découverte du texte. J’ai vu à quel point la pièce de Molière déclenchait le rire du public. C’était jubilatoire. Je l’ai ensuite laissé sommeiller. Étrangement, elle a toujours été là secrètement au fond de moi ». Le metteur en scène y revient vingt ans plus tard avec sa compagnie La Mandarine blanche.

Une modernité

C’est toute la modernité du texte de Molière qu’Alain Batis souhaite souligner. « Il résonne avec aujourd’hui. Isabelle prend le risque de la vie. J’ai été très touché par ce personnage. C’est la vie à l’état pur. Chez elle, la vie est plus forte que tout. Elle affronte Sganarelle et déjoue ce à quoi on veut la former. Les trois femmes de la pièce ont d’ailleurs une position par rapport au patriarcat, à leurs droits  et à la liberté des sentiments ».

Quant à Sganarelle, Alain Batis veut révéler toute sa complexité de ce personnage. Il se comporte comme un despote et Molière en présente tous les travers. « Il reste cependant attachant. On voit toute son humanité. Sinon, on se retrouve dans une forme de manichéisme. Sganarelle peut être aussi aimant et mal aimé. C’est en fait un être qui se perd ».

« Une musique de la pensée« 

Alain Batis a également choisi L’École des maris pour sa singularité. « Il y a un objectif dans cette pièce, un fil qui se tend du début jusqu’à la fin. Et nous avons pris les alexandrins pour traverser l’histoire. Cette langue est dans la beauté. Tout le travail qui demande une grande rigueur a été d’effacer les coutures de ce langage et mettre en avant les enjeux de la pièce. La musique de la pensée doit épouser la musique de la langue ».

Pour les interpréter, le metteur en scène a imaginé pour cette troupe de sept comédiennes et comédiens une sorte de kamishibaï qui permet de « circonscrire les espaces. On est comme au cinéma ». Dans cette « boîte à jouer », les époques se confondent. Les genres se confrontent. La dimension comique surgit de la tragédie.

Infos pratiques

  • Jeudi 8 et vendredi 9 décembre à 20 heures à l’espace Marc-Sangnier à Mont-Saint-Aignan
  • Durée : 1h35
  • Spectacle à partir de 12 ans
  • Représentation en audiodescription le vendredi 9 décembre
  • Tarifs : 20 €, 15 €
  • Réservation au 02 35 70 22 82 ou sur www.cdn-normandierouen.fr