Il y a du changement à la direction du Tetris. Boris Colin, qui succède à Franck Testaert, a pris les rênes de la salle de musiques actuelles du Havre le 1er juin 2024. Une vie et une tête bien remplies de musiques.
Le déclic s’est produit à la faculté de Nancy. Boris Colin qui a grandi dans les Ardennes découvre alors les joies d’une grande ville avec notamment ses salles de concerts. « J’avais face à moi une offre à laquelle je n’étais pas habitué ». Il n’est pas musicien. « Je n’en ai pas le don ». Mais le lycéen de Sedan a un appétit d’ogre pour les musiques, le rock, le garage, l’électro, le rap, la soul, la folk, le jazz… « Tout cela a évolué au fil du temps. Quand j’étais jeune, j’écoutais des musiques relativement dures. Nirvana était le groupe au sommet. Quand est sorti Unplugged, je n’ai pas compris. Pour moi, c’était une trahison. Aujourd’hui, c’est l’album que j’écoute le plus ». À 20 ans, Boris Colin savait ce qu’il voulait faire dans la vie : « organiser des concerts. Et cela ne m’a jamais quitté ». Il y est parvenu.
De 2008 à 2021, il dirige Le Grand Mix à Tourcoing. Il part de la SMAC du Nord de la France pour regarder de plus près l’envers du décor et intègre la FEDELIMA (Fédération des lieux de musiques actuelles). « J’avais envie d’avoir un regard plus global sur les musiques actuelles. J’aime beaucoup ce genre de travail. Mais c’était un travail en solitaire ». Retour alors sur le terrain.
Une découverte
Boris Colin candidate au poste de direction du Tetris au Havre et succède à Franck Testaert le 1er juin 2024. « Ici, j’ai l’impression d’être à ma place. C’est la première fois que je ressens cela. Je sais que je peux apporter quelque chose à cette salle. J’identifie les enjeux qui se posent à nous. Je suis plus confiant et c’est très agréable. Au Grand Mix, nous avons créé un club de 300 places à côté de la salle de plus de 700 places, un espace de travail pour les musiciens, un restaurant. J’avais besoin de retrouver cela dans une autre mesure. De plus, au Havre, il y a le festival et une radio ».
Le nouveau directeur est arrivé au Havre sans vraiment connaître la ville et le Tetris. C’est sa façon de procéder. « Je n’aime pas venir à un endroit avec des a priori. Je préfère aller à la découverte ». Alors, Le Havre ? « C’est très beau. L’architecture me plaît ». Et Le Tetris ? « J’aime beaucoup le lieu, le rapport entre la scène et la salle, la circulation du public… J’étais venu une seule fois. C’est un outil où je me retrouve. Il est grand mais chaleureux. La salle a moins de 11 ans et est en bon état. Il y a beaucoup de choses à faire ici. C’est un terrain de jeu des plus attractif ».
Observer
Jusqu’à la fin de cette année 2024, Boris Colin se pose en observateur de ce terrain. « Je souhaite confronter mes intentions à la réalité du territoire, aux attentes des salariés et des partenaires. C’est un travail qui doit être effectué de manière collective et dans une cohérence totale du projet ». La réflexion porte sur l’accompagnement des artistes et des groupes, la médiation et la programmation. Celle-ci doit ainsi nourrir la rédaction d’une convention pluriannuelle d’objectifs. « C’est important parce qu’elle définit le projet sur les trois prochaines années ».
Le nouveau directeur du Tetris découvre également la vie artistique au sein du fort de Tourneville avec Le CEM ou encore PiedNu, et la création musicale en Normandie. Il envisage de tisser des liens avec les autres structures culturelles havraises et les salles normandes comme Le 106 à Rouen ou Le Cargö à Caen. Celui qui a passé plus d’une décennie à Tourcoing a bien évidemment une vision européenne. « Il faut sortir du contexte franco-français. Nous allons tester des projets avec d’autres villes portuaires. Il est nécessaire de se rencontrer, de parler de nos pratiques et de penser à des échanges artistiques. Au fil du temps, nous pourrons être plus ambitieux ».
Boris Colin le sait. Tout cela se fera dans un contexte difficile. « Depuis que je travaille, l’argent public est rare et il faut en être responsable. Nous devons être réalistes et vigilants et nous savons nous adapter ». Au Tetris au Havre, Boris Colin garde cet enthousiasme pour défendre le secteur des musiques actuelles, « toujours fragile et parfois difficile à appréhender ».