Le Poème harmonique joue “L’Uomo Femina” de Galuppi

photo : Mirco Magliocca / Opéra de Dijon

Sur cette île, ce sont les femmes qui gouvernent. Les hommes, eux, doivent se soumettre à leurs décisions et désirs. C’est l’histoire de L’Uomo Femina, un opéra très peu connu de Baldassare Galuppi retrouvé par Vincent Dumestre. Son Poème harmonique le joue les 15 et 16 novembre au Théâtre de Caen.

L’Uomo Femina de Baldassare Galuppi est une œuvre rare. Vincent Dumestre a pu la consulter en 2014. « La partition a été retrouvée il y a vingt-cinq ou trente ans à la bibliothèque du palais royal à Lisbonne. On connaissait son existence. Elle fait partie de ces œuvres conservées dans des endroits bien repérés et découvertes par hasard. Elle a très certainement quitté Venise au moment des guerres napoléoniennes pour voyager en Europe et se retrouver au Portugal ». Le musicien, fondateur du Poème harmonique et fin connaisseur du répertoire baroque, consacre une partie de son temps à dénicher des musiques méconnues et leur redonner tout leur éclat.

Une première place pour les femmes…

L’Uomo Femina ou L’Homme femme… Vincent Dumestre a tout d’abord été interpellé par le titre de cet opéra italien. « J’ai été surpris. Je me suis demandé ce que ce titre voulait dire. Nous sommes au XVIIIe siècle, l’époque où on aime le travestissement, l’esprit de carnaval, le renversement des habitudes… Venise a toujours eu ce tropisme ». Le sujet, c’est ce qui fait aussi la rareté de cette œuvre de Baldassare Galuppi (1706-1785), écrite sur un livret de Pietro Chiari (1712-1785) et donné les 15 et 16 novembre au Théâtre de Caen.

L’Uomo Femina se déroule sur une île où les femmes gouvernent seules. Les hommes sont soumis et restreints à certaines occupations. Ils doivent aussi rester fidèles et beaux. La vie est chamboulée lorsqu’arrivent deux naufragés. La princesse Cretidea, qui a comme favori Gelsomino, tombe amoureuse de l’un d’eux, Roberto. Or les deux hommes viennent d’une autre société où les femmes n’ont pas le pouvoir. Suivent des négociations, des disputes, des complots, des scènes de jalousie…

« Pietro Chiari, qui était aussi romancier, souhaitait à la fois instruire et divertir. Dans cet opéra, il a voulu défendre la place de la femme dans la société vénitienne. Il a écrit une chose étonnante : le XVIIIe siècle est le siècle de la femme. Dans les siècles qui suivront, les femmes ne seront plus les esclaves des hommes mais leurs égales et leurs compagnes. Il y a une prise de conscience et une véritable remise en question du patriarcat ».

… et le retour des hommes

Néanmoins, à la fin, les hommes reprennent le pouvoir… « C’est un schéma obligé à l’opéra, indique Vincent Dumestre. Tout revient à la norme. Après cette scène, Galuppi écrit un chœur final somptueux et le librettiste prend la parole pour dire : celui qui a du flair et de l’entendement aura compris ce que l’auteur a voulu dire. C’est une bouteille jetée à la mer pour l’histoire ».

L’Uomo Femina est enfin une œuvre rare pour son univers sonore. « Elle fait partie des dernières partitions de Galuppi. C’est un style qui appelle Haydn et Mozart. Nous sommes proche de Cosi van tutte mais vingt-cinq ans plus tôt. La musique est puissante, aussi légère, très vénitienne », remarque Vincent Dumestre qui a confié la mise en scène à Agnès Jaoui, comédienne, réalisatrice, chanteuse et aussi mélomane.

Infos pratiques

  • Vendredi 15 novembre à 20 heures, samedi 16 novembre à 18 heures au Théâtre de Caen
  • Durée : 2h30
  • Tarifs : de 47 à 10 €
  • Réservation au 02 31 30 48 00 ou en ligne