Dans ce concert sont réunis Mozart et le Mozart français : Wolfgang Amadeus (1756-1791) et François Devienne (1759-1803). Julien Chauvin dirige de son violon samedi 17 et dimanche 18 mai à la chapelle Corneille à Rouen l’orchestre de l’Opéra de Normandie Rouen dans ce répertoire de symphonies lumineuses : la n°39 du premier et la n°4 du second. Le musicien, fondateur du Concert de La Loge et cofondateur du Cercle de l’harmonie et du Quatuor Cambini-Paris, ajoute la Sérénade n°7, dite Haffner, de Mozart, très pétillante. Entretien avec Julien Chauvin.
François Devienne est surnommé le Mozart français. Quels sont les points communs entre ces deux compositeurs ?
On dit que François Devienne est le Mozart français parce qu’il a une sensibilité mélodique. Il a en effet des facultés à écrire des thèmes simples. Il est possible de les siffler après les avoir entendus une seule fois. Son écriture est très efficace.
Y a-t-il de grandes différences dans leur écriture ?
Mozart est inimitable. Il est un génie total. Devienne est un instrumentiste, un professeur qui a écrit une méthode pour jouer de la flûte. Il a peu composé. Son œuvre n’est pas gigantesque. J’ai souhaité lui donner un éclairage. En imaginant ce programme, je n’ai pas forcément cherché une similitude ou une cohérence. Mon intérêt est de mettre en valeur les musiciens de l’orchestre. Dans sa Symphonie concertante, Devienne met en avant les solistes, la flûte, le hautbois, le basson et le cor. Là, ceux-ci changent de rôle. Ils sont solistes devant l’orchestre. Pour eux, c’est un moment spécial. Ils sont accompagnés par un orchestre de musiciens qu’ils connaissent bien. Il y a quelque chose de fraternel.
Vous faites suivre cette pièce de la Symphonie n°39 de Mozart. Comment qualifieriez-vous cette œuvre ?
C’est une des trois dernières symphonies composées par Mozart à la fin de sa vie. Il l’écrit sans répondre à une commande. C’est une œuvre particulière avec une introduction lente dans le premier mouvement. Mozart utilise aussi un rythme que l’on décrit souvent comme les battements du cœur. Comme il le fait dans Don Giovanni pour signifier l’arrivée du Commandeur. On passe par différents états et par toutes les émotions. Il y a ensuite un apaisement total dans cette tonalité de mi bémol. Suivent un mouvement avec des passages très théâtraux et un menuet final ébouriffant. Mozart écrit cette symphonie après avoir écrit des centaines d’œuvres et des centaines de pages pour l’opéra. Il a une maîtrise totale du sentiment qu’il veut faire passer. Il peut nous faire passer du rire aux larmes en une transition. Comme il peut nous faire passer d’un moment d’angoisse totale à un état de jubilation et de badinerie.
Le concert commence avec la Sérénade n°7, composée plus tôt.
C’est une œuvre en ré majeur, très solaire et très pétillante. Elle est comme des nuages qui passent. Mozart l’écrit pour un ami, Sigmund Haffner, et elle sera jouée pour le mariage de son fils.
Est-ce que ces œuvres comportent des difficultés particulières ?
Elles sont très virtuoses pour les cordes. Par ailleurs, ce qui demande véritablement de la virtuosité, c’est que je dirige du violon. Les réflexes pour les musiciens sont différents. Ils doivent s’écouter davantage.
Pourquoi ce choix ?
Il y a plusieurs raisons. La première est historique. Le chef apparait tardivement au XIXe siècle. Puis, diriger à la baguette, c’est parfois un peu infantilisant et réducteur pour les musiciens de l’orchestre. Ces musiciens ont un savoir, une expérience, une culture. Ils sont aguerris. Ils ont une tradition d’écoute et de réactivité. Ils savent jouer tout seuls. Là, c’est à eux de prendre en main la partition musicale. Je vais les aider, les encourager, leur donner les entrées et les intentions. De plus, en me joignant à eux, je fais partie de l’orchestre.
Est-ce un défi pour vous ?
J’y trouve quelque chose de naturel. Dans le son, il faut en effet avoir une vision de terrain et une vision de recul. Finalement, je fais confiance à des personnes qui ont de belles qualités. Et il faut les révéler.
Infos pratiques
- Samedi 17 mai à 18 heures et dimanche 18 mai à 11 heures à la chapelle Corneille à Rouen
- Durée : 1h15
- Tarifs : de 38 à 10 €
- Réservation au 02 35 98 74 78 ou sur www.operaderouen.fr
- Aller au concert en transport en commun avec le réseau Astuce