Ce concert commence à l’Aube pour se terminer par une Nuit de fête. L’Aube, c’est la partition d’Emmanuel Chabrier et la Nuit de fête, celle d’Offenbach. Une journée se déroule en seulement une heure et en musique en compagnie de Bizet, Chaminade, Ravel et Debussy pour traverser des moments légers, apaisés et euphoriques. C’est le programme de la tournée d’été de l’orchestre de l’Opéra de Normandie Rouen, dirigé par Félix Bénati, dans la métropole dans le cadre de Jours de fête et d’Un Été au cœur de l’aître Saint-Maclou. Entretien avec le maestro.
Qu’est-ce qui vous a amené jusqu’à la direction d’orchestre ?
J’ai tout d’abord un amour du répertoire pour orchestre. J’ai entendu à l’âge de 8 ans l’enregistrement des Tableaux d’une exposition de Moussorgski, dirigé par Claudio Abbado. J’ai adoré la manière dont l’orchestre sonnait. Enfant, j’écoutais cette musique et je dirigeais les livres de ma bibliothèque. Après ce fut un concours de circonstances. Au lycée Condorcet à Paris où j’étais, il y avait des ensembles instrumentaux. Un jour, il a manqué un chef à l’orchestre Condorcet. J’ai commencé à le diriger, à organiser le répertoire, à faire des arrangements. J’en ensuite pris des cours d’initiation à la direction au conservatoire avant d’intégrer le conservatoire national supérieur de Paris. J’ai eu mon diplôme en 2023.
Est-ce que ce métier que vous exercez aujourd’hui correspond au rêve de l’enfant de 8 ans ?
Je ne me suis jamais posé la question. Je dirais que oui. Aujourd’hui, la direction d’orchestre, c’est ma vie. Je ne l’envisagerais pas autrement. Cependant, je n’ai jamais fantasmé ma place. C’est davantage l’orchestre qui m’intéresse. Les sensations que j’ai à son contact sont bien réelles.
De quel instrument jouez-vous ?
J’ai fait du piano et du chant. Ce sont surtout des instruments de travail dans l’apprentissage de la partition.
Quelle place tient la voix ?
Elle est importante. J’ai eu une approche plus tardive de la voix. J’ai commencé la direction pendant le chant et j’ai embrassé ce rapport à la voix, notamment avec le travail du texte. Ce fut très fondateur pour moi. J’ai aussi chanté dans un chœur. J’ai fondé et dirigé Les Temps dérobés avec des amis chanteurs. Je trouve qu’il y a un lien entre la voix et l’orchestre, entre les tessitures vocales et instrumentales. Chaque instrumentiste aborde sa partition comme un chanteur. En répétition, je chante très souvent. J’aime bien travailler avec les chanteurs, être en échange avec eux. Quand ils sont solistes, j’aime leur donner des suggestions et réagir à leurs suggestions.
Vers quels répertoire allez-vous plus naturellement ?
Mes premières amours sont le répertoire des XXe et XXIe siècle. J’ai aussi beaucoup de curiosité pour les musiques ancienne, baroque, de la Renaissance, médiévale, aussi pour les grandes symphonies de XIXe siècle, pour Beethoven, Brahms et Mahler. L’œuvre que je préfère, c’est toujours celle sur laquelle je suis en train de travailler. Néanmoins, il y a une forme d’évidence avec les musiques des XXe et XXIe siècles. Maintenant, j’arrive à me l’expliquer. Ces périodes brassent une palette de différents styles et esthétiques. Il y a beaucoup d’échanges, de découvertes, une richesse, un foisonnement qui m’émerveillent.
À quel âge avez-vous mené toutes ces recherches ?
Il y a eu une période où j’ai aimé découvrir. À 16 ans, j’ai acheté beaucoup de partitions et de CD. J’ai découvert des compositeurs de musique contemporaine comme Stravinsky, Ravel et Debussy. Ce sont mes trois champions. Je suis allé de coup de foudre en coup de foudre. Il y a toujours une curiosité qui m’anime et me pousse à aller vers des partitions qui sont peu jouées. J’aime programmer des musiques dont je sais que ce sera une découverte pour beaucoup.
Comment abordez-vous les partitions ?
Je prends une partition et je commence à la lire sans piano. J’essaie d’entendre les harmonies. Je me chante les mélodies. C’est un travail très lent. Ensuite, j’essaie de fluidifier tout cela, d’entendre toute la partition et d’être dans le temps réel. Quand tout est fluide dans ma tête, j’écoute diverses versions existantes les unes après les autres pour garder une liberté et faire en sorte que la partition reste la référence. Je repère les choses auxquelles je n’ai pas pensé ou que j’ai pensé et pas les autres. Je m’interroge et je vois comment je me positionne. J’aime prendre du temps. Quand j’arrive devant l’orchestre, beaucoup de choses sont déjà réglées. Et je peux être dans l’instant présent.
Quel est le fil rouge du répertorie de ce concert ?
C’est un jour de danse. Les musiques sont des danses. Il y a un menuet, un rigaudon, une valse… On a quelque chose de vif pour le réveil et le matin, de très rustique le midi. Ensuite, les choses s’apaisent le temps de la sieste avant de redevenir plus énergique le soir, au moment de la fête. Dans un répertoire, j’aime bien aussi faire un lien avec le lieu où l’on joue. Chabrier s’est inspiré des vents marins à Saint-Pair-sur-Mer. Ravel a finalisé Le Tombeau de Couperin lors de sa résidence à Lyons-la-Forêt. Connaître le nom du compositeur d’une musique, c’est une chose mais savoir ce qui lui a servi d’inspiration ajoute une dimension.
Infos pratiques
- Dimanche 6 juillet à 18 heures au parc de verdure à Montmain
- Mardi 8 juillet à 13h30 à la chapelle de l’hôtel Charles-Nicolle à Rouen
- Mercredi 9 juillet à 18 heures sur la Dalle de la Grand-Mare à Rouen
- Jeudi 10 juillet à 18 heures au parc Grammont à Rouen
- Mercredi 16 juillet à 18 heures à l’aître Saint-Maclou à Rouen
- Vendredi 18 juillet à 18 heures place de l’Église à Sainte-Marguerite-sur-Duclair
- concerts gratuits