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Lonny : « Les mots doivent entrer en résonance avec moi »

photo : Frédérique Bérubé

Elle est passée du violon alto à la guitare, du classique à un folk intime, de collaborations au projet solo, de l’anglais au français. Lonny trace un chemin qui l’emmène vers des espaces plus lumineux. Pour y parvenir, il faut déjà faire un état des lieux. C’est l’objet des premiers titres empreints de chagrin, de mélancolie, de doutes, de manque, d’espoir et portés par une voix pleine d’éclat. Lonny sera en trio ce 29 juillet sur Les Terrasses du jeudi à Rouen. Entretien.

Vous avez mené plusieurs projets artistiques. Comment abordez-vous la musique aujourd’hui ?

Je ne pense pas que mon rapport à la musique ait changé. Il s’est approfondi et est davantage dans la sincérité. J’ai appris à être ma propre accompagnatrice. Pour cela, il faut un double cerveau. La musique fait partie de ma vie quotidiennement. J’en ai toujours écoutée. Mon amour pour la musique reste intense. Je pense que la musicalité est une chose qui se vit et est en soi.

Est-ce que le violon a été un vrai choix ?

Oui, je l’ai choisi quand j’étais petite. Mais j’aimais surtout le violoncelle. Je me suis tournée vers l’alto en raison des sonorités qui ne sont pas trop différentes. Le violon m’a beaucoup plus parlé que le chant. Enfant, je ne voulais pas chanter. 

Avez-vous opté pour l’alto avec son répertoire ?

Oui, j’ai pris l’alto avec son répertoire classique. Je me suis vite prise d’émotion pour la musique du XIXe siècle. Il y a eu cependant une minuscule vague avec l’opéra. J’ai été bercée par la musique classique pendant dix ans.

Le folk arrive ensuite.

Il arrive avec l’adolescence, au lycée. Avec un groupe de copains, on écoutait beaucoup de musique. Comme j’avais besoin de m’identifier, je me suis tournée vers des certaines chanteuses. Je suis allée chercher mes réponses chez les figures folk telles que Joan Baez, Joni Mitchell et aussi Patti Smith même si elle ne fait pas partie de ce courant-là. Leur musique m’a touchée au cœur de manière ésotérique. J’étais plongée dedans.

Comment la musique de ces femmes vous a touchée ?

Elle venait remplir une case émotionnelle et offrir de l’évasion. Elle comblait quelque chose qui n’existait pas. J’aime leur rapport à la liberté, à la poésie. Il est brut, avec une grosse sincérité dans les instruments, dans les enregistrements. C’est juste une guitare-voix. C’est simple et ça fait du bien. On était à cette période-là dans la musique électro avec notamment Justice. Je n’arrivais pas à me reconnaître dans cette énergie-là.

L’écriture revêt une autre dimension. Quand s’est-elle imposée ?

J’ai commencé à écrire en anglais. Ce n’est pas ma langue naturelle mais j’ai de la famille au Canada et je vais souvent en Angleterre. J’ai commencé par l’anglais parce que j’aime l’idée de l’écriture automatique. Cette langue me le permettait. En français, il est nécessaire de se poser des questions. Il faut trouver un équilibre entre le fond et la forme. Cela m’a pris du temps de trouver les mots justes. Au début, c’était un peu chaud. Je n’ai pas beaucoup lu en français. En fait, j’ai lu autant en français qu’en anglais. C’était alors vertigineux. Je ne me sentais pas assez légitime. Je me considérais surtout comme une musicienne. Pour y parvenir, cela m’a pris beaucoup d’intériorité. Les mots doivent entrer en résonance avec moi. La lecture m’a alors pas mal aidée.

Les titres sont un état des lieux. Est-ce réfléchi ?

Oui, c’est complètement réfléchi. Avec les premières chansons, on a besoin de faire un état des lieux, de cerner les sujets, les tourments. Il est important de faire le tour de ses angoisses, de quelques questions. Même si elles me dépassent. Mais cela me rassure.

Est-ce parce qu’elles vous emmènent ailleurs ?

Cette notion de mutation est là parce qu’il y a eu des ruptures à plein d’endroits. Les transformations sont passionnantes à raconter. Il faut des perspectives et faire une place à la lumière.

Est-ce que cela doit se faire dans la solitude ?

La solitude est une notion paradoxale. C’est à la fois le problème et la solution. Chez moi, il faut l’apprivoiser et l’abdiquer. Elle sous-entend l’abnégation et la résilience, ce fameux mot. Elle représente quelque chose de très sombre et de lumineux. Toute la question est : comment on s’en sort ? On arrive tout seul et on repart tout seul. 

Comment avez-vous pensé les différentes chansons pour les concerts ?

Nous sommes trois sur scène. Nous avons repensé les chansons. Je tiens à ce que les versions en live soient différentes. Un album est une version clinique, comme neutre, des titres. C’est de cette manière que je les ai entendues. Maintenant, ils doivent vivre.

La programmation du 29 juillet 

  • Square Gaillard-Loiselet : Lonny à 18h30, Octantrion à 21 heures
  • Place du Chêne rouge : Biceps-B à 18h30, Johnny Mafia à 21 heures

Infos pratiques

  • Concerts gratuits
  • Jauge limitée, pass sanitaire demandé
  • Renseignements sur www.terrassesdujeudi.fr
  • photo : Frédérique Bérubé