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« Tannhäuser » de Wagner au milieu d’une lutte de religions

La saison de l’Opéra de Rouen Normandie s’est terminée brutalement en mars 2020 avec Tosca, une pièce mise en scène par David Bobée. La prochaine commence le 27 septembre avec une des plus grandes œuvres du répertoire lyrique, Tannhäuser de Wagner, confiée également au metteur en scène rouennais et directeur du CDN de Normandie Rouen. C’est à voir du 27 septembre au 3 octobre au Théâtre des Arts.

D’un côté, il y a Vénus, symbole de la femme fatale et de l’amour charnel, de l’autre, Élisabeth, la figure sacrée, de la chasteté se sacrifiant pour l’homme qu’elle aime. Deux images opposées trop réductrices pour David Bobée. Le metteur en scène rouennais va bousculer ces stéréotypes d’un autre âge dans sa mise en scène de Tannhäuser de Wagner. 

Tannhäuser, poète et chanteur, vit auprès de Vénus et savoure le plaisir de l’amour. Là-bas, il est traité comme un dieu. Quelques mois plus tard, il va regretter sa vie d’avant et va jusqu’à évoquer la Vierge Marie afin que Vénus le laisse partir. Il va retrouver Elisabeth qui l’attend depuis son départ. Lors d’un concours qui a pour thème l’amour, Tannhäuser interprète un chant qui célèbre le plaisir charnel. Un véritable outrage pour l’assemblée qui le bannit. Le chanteur devra rencontrer le pape au Vatican afin d’obtenir un pardon. Il lui sera refusé. Elisabeth meurt d’amour et de prière. Quand Tannhäuser décide de revenir auprès de Vénus, il croise le cercueil d’Élisabeth et s’éteint à son tour. Son âme sera néanmoins sauvée.

En quête de sens

À la lecture du livret, première étape de son travail, David Bobée s’est interrogé sur « la présence des dieux mythologiques au milieu de l’Europe à cette époque. Je me suis souvenu : quand Rome est devenue chrétienne, les dieux de la mythologie ont quitté leurs terres. Il y a donc eu une extinction d’une religion à la faveur d’une autre ». Dans l’opéra de Wagner, il se concentre alors sur « une opposition entre Vénus et la Vierge ». Si les histoires d’amour n’ont jamais vraiment passionné le metteur en scène rouennais, le sujet d’une « religion comme un outil d’asservissement » l’a davantage intéressé. Il y trouve là « une clé de résonance d’aujourd’hui ».

Et Tannhäuser dans cette confrontation entre Vénus et la Vierge ? « Il est un personnage complexe en quête de sens, de vérité, de liberté. La question du libre arbitre l’occupe beaucoup. Auprès de Vénus, il a un bonheur assuré mais son libre arbitrage lui est retiré. C’est pour cette raison qu’il va quitter ce jardin d’Eden. Il fait exploser ce qui est faux. Il y a quelque chose d’Hamlet chez lui. Il est une figure du héros tragique moderne qui doit affirmer sa singularité ».

Une plateforme de 4 tonnes

Entre Wagner et Rouen, il y a une longue histoire qui sera racontée lors d’une conférence le 2 octobre par Yannick Simon, musicologue. Tannhäuser, un opéra en trois actes, créé en 1845 à Dresde, a été donné une première fois à Rouen en 1897 après l’échec parisien. Il n’y a pas eu de Tannhäuser depuis vingt-huit ans. Ces trois représentations au Théâtre des Arts à partir du 27 septembre seront données par l’orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie et l’Orchestre régional de Normandie, dirigés par Rudolf Piehlmayer dans un cadre exceptionnel en raison de la crise sanitaire. Pas de public à la corbeille, juste dans les premier et deuxième balcons, avec à la place des fauteuils, une grande plateforme de 200 m2 pesant 4 tonnes pour les musiciennes et les musiciens des deux formations. David Bobée y adapte sa mise en scène imaginée pour le théâtre de la ville de Klagenfurt en Autriche en septembre 2019.

Infos pratiques

  • Dimanche 27 septembre à 16 heures, mercredi 30 septembre à 19 heures, samedi 3 octobre à 17 heures au Théâtre des Arts à Rouen
  • Durée : 3h45
  • Tarifs : de 68 à 10 €
  • Réservation au 02 35 98 74 78 ou sur www.operaderouen.fr
  • photo : Tannhäuser © KH Fessl

Les actions culturelles

  • Représentation en audio description : dimanche 27 septembre à 16 heures
  • Retransmission en direct de la représentation du samedi 3 octobre sur grand écran en plein air place de la Cathédrale à Rouen et à Seine-Musicale à Boulogne-Billancourt, en salle à l’auditorium à Bagnoles-de-l’Orne, au théâtre Le Piaf à Bernay, à la salle de spectacles à Conches-en-Ouche, au théâtre à Lisieux, au Rexy à Saint-Pierre-en-Auge, à L’Arsenal à Val-de-Reuil, à la Maison des Arts et Culture à Yquebeuf, dans les cinémas à Carentan, Elbeuf, Fécamp, Montivilliers, Les Andelys et Yvetot. Diffusion gratuite.

Les rencontres

  • Répétition publique : samedi 19 septembre à 19 heures
  • Introduction à l’œuvre : une heure avant chaque représentation
  • Conférence sur Rouen, Bayreuth sur Seine par Yannick Simon, professeur de musicologie à l’Université de Rouen : vendredi 2 octobre à 19 heures
  • L’Apéro des critiques : lundi 5 octobre à 19 heures