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Théâtre au CDN : une rébellion contre une société puritaine

photo Hubert Amiel

Juste avant le passage au monde des adultes, l’adolescence est une suite de questionnements justement racontée dans L’Éveil du printemps par Wedekind. Armel Roussel s’empare à nouveau de cette pièce avec sa compagnie [e]utopia[4] qui joue du 14 au 16 mars au CDN de Normandie Rouen.

photo Hubert Amiel

L’Éveil du printemps, c’est celui de la sensualité, de la sexualité. Frank Wedekind (1864-1918) le raconte chez un groupe d’adolescents qui vivent trop à l’étroit dans une société puritaine, restent prisonniers des désillusions et des angoisses. Impensable donc pour Madame Bergmann d’expliquer à sa fille Wendla la conception et la naissance des enfants. La jeune fille se jettera alors dans les bras de Melchior pour perdre sa virginité. Elle mourra à la suite d’un avortement clandestin et lui finira en maison de correction après avoir noté ses premières expériences sexuelles sur un cahier. Martha ne veut plus être battue pour connaître un peu de douceur. Quant à Moritz, il peine à trouver sa place dans ce monde, échoue à ses examens et ne verra qu’une seule issue : le suicide. Enfin Hans et Otto qui se découvrent une attirance mènent une vie débridée.

Une nouvelle redécouverte

Comme Hamlet de Shakespeare, L’Éveil du printemps de Wedekind ne quitte pas Armel Roussel. Le metteur en scène visite cette pièce publiée en 1891 pour la quatrième fois. « Wedekind travaille au corps les fondamentaux de ce qui fait le théâtre : le désir, le vivre ensemble, le rapport à la mort, la manière dont on s’éduque, les pressions sociales ». Autre raison : « les personnages sont des adolescents, comme des prototypes de héros. L’adolescence, c’est le moment de tous les possibles, le moment où on fait des choix. Wedekind aborde l’identification du désir, l’attraction sexuelle. L’Éveil du printemps est un texte antérieur à la psychanalyse. Freud et Lacan s’en sont référés. Wedekind s’est donné la liberté d’aller dans des zones de l’inconscient ».

Armel Roussel revient à L’Éveil du printemps, armé de ces trois premières expériences. « Pourtant, j’ai l’impression de redécouvrir la pièce. Cette fois, j’ose aller plus loin, dans des choses plus pulsionnelles. J’ai abordé L’Éveil du printemps de manière frontale. Du coup, il en ressort un travail plus festif ». Le metteur en scène n’a pas oublié les écrits de l’auteur à propos de cette « tragédie enfantine » : « Je serais étonné si je vois le jour où on prendra enfin cette oeuvre comme je l’ai écrite voici vingt ans, pour une peinture ensoleillée de la vie, dans laquelle j’ai cherché à fournir à chaque scène séparée autant d’humour insouciant qu’on en pouvait faire d’une façon ou d’une autre ». Pour Armel Roussel, le rire crée l’émotion.

Entourés du duo Juici, 11 comédiens et comédiennes se retrouvent sur un plateau nu recouvert de terre pour interpréter une quarantaine de rôles. « Quand j’ai réfléchi à l’espace, des souvenirs ont ressurgi et appartenaient plus à la campagne qu’à la ville ». Un véritable terrain de jeu.

  • Mercredi 14, jeudi 15 et vendredi 16 mars à 20 heures au théâtre de La Foudre à Petit-Quevilly. Tarifs : 18 €, 13 €. Pour les étudiants : carte Culture. Réservation au 02 35 70 22 82 ou sur www.cdn-normandierouen.fr