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80 ans après l’exil forcé

photo : Lydie Turco

À travers des photos et des documents d’archives, Lydie Turco retrace l’histoire de familles réfugiées espagnoles arrivées en France pendant la guerre civile entre 1936 et 1939. Jusqu’au 31 mars, Stratégie de l’effacement revient sur des récits enfouis dans les mémoires à la bibliothèque Simone-de-Beauvoir à Rouen.

Sur une des photos, se trouve Lydie Turco. La photographe rouennaise est entourée de son mari, son fils, ses parents, sa grande-tante et autres membres de sa famille. Une famille qui a ses racines en Espagne. Ce que Lydie Turco connaissait de son histoire se résumait en deux phrases : « ton arrière-grand-père était espagnol. Républicain, il a fait la guerre d’Espagne ». Ces seules informations lui suffisaient. Jusqu’à la naissance de son fils. 

Avec l’arrivée d’un enfant, Lydie Turco a voulu retisser un fil. « Rien ne m’avait été transmis. Ce n’était pas tabou mais personne en parlait. J’ai tout découvert en discutant avec mon arrière-grand-mère. J’avais besoin de mettre des mots sur ce que je ressentais, sur ce que je véhiculais inconsciemment. Je suis fière d’avoir dans ma famille des républicains qui ont combattu pour un idéal. Je la porte, cette histoire, et je l’ai portée sans le savoir ».

Dix familles

La photographe entreprend alors un projet documentaire sur cette Retirada, l’exil de familles espagnoles républicaines qui viennent trouver refuge en France. À leur arrivée, ces familles étaient séparées : les hommes dans des camps, les femmes et les enfants dans des centres d’hébergement. Tous répartis dans diverses régions. À Rouen, il a existé deux lieux d’accueil, rue Annie-de-Pène dans le quartier du Mont-Gargan et rue du Passage-Dupont sur la rive gauche.

Dans son travail, entamé avec l’historienne Maëlle Maugendre, Lydie Turco recueille des témoignages de différentes familles. Elle est aussi partie à la recherche des anciens centres d’hébergement et de documents d’archives, comme des lettres d’admission, des courriers de préfets ou des rapports administratifs. Présentée jusqu’au 31 mars à la bibliothèque Simone-de-Beauvoir, cette exposition, Stratégie de l’effacement, retrace l’histoire de dix familles exilées. Lydie Turco a accroché leur portrait, réalisé en noir et blanc à la chambre photographique. Dans cette image, au charme suranné, il se lit dans les regards des déchirures et des souvenirs si présents. Elle y a ajouté la photo, numérique celle-ci, de leur centre d’hébergement ou ce qu’il en reste. D’un côté, l’émotion vive, de l’autre, les faits bruts.

Avec Stratégie de l’effacement, Lydie Turco revient avec un regard tendre et incisif sur un pan de l’histoire volontairement oublié, sur l’accueil de ces réfugiés qui n’a pas été des plus chaleureux de la part de l’État. Il a été plus généreux par les habitants et les associations.

photo : Lydie Turco

Infos pratiques

  • Jusqu’au 31 mars, le mardi de 13 heures à 19 heures, le mercredi de 10 heures à 18 heures, les jeudi et vendredi de 13 heures à 18 heures, le samedi de 10 heures à 18 heures, le dimanche de 11 heures à 13 heures et de 14 heures à 17 heures, à la bibliothèque!que Simone-de-Beauvoir à Rouen
  • Entrée gratuite
  • Renseignements au 02 76 08 80 88 ou sur rnbi.rouen.fr