Dans leur documentaire, 1874, la naissance de l’impressionnisme, Julien Johan et Hugues Nancy remontent le fil de l’histoire d’un courant pictural mémorable. Les deux réalisateurs seront présents jeudi 4 avril au cinéma Omnia à Rouen pour la présentation de ce film, tourné en Normandie.
1874, la naissance de l’impressionnisme, c’est le titre et la fin du documentaire de Julien Johan et Hugues Nancy. Le 15 avril 1874 ouvre une exposition indépendante avec environ 150 œuvres dans l’atelier du photographe Nadar au 35, boulevard des Capucines à Paris. Ces pièces sont signées par Monet, Renoir, Pissarro, Degas, Morisot, Sisley, Cézanne… De jeunes artistes refusant les codes académiques de la peinture de l’époque et le système étatique verrouillé qui refuse leurs toiles et leurs sculptures pour le traditionnel Salon de Paris. Les dernières images du film emmènent ainsi dans une reconstitution des deux étages de ce lieu emblématique à la découverte de multiples chefs-d’œuvre. L’exposition ne sera pas un immense succès et ces artistes devront patienter encore quelques années pour avoir une reconnaissance de leur talent.
Ce sont les douze années précédant la naissance de l’impressionnisme qui intéressent Julien Johan et Hugues Nancy dans leur film, soutenu notamment par Normandie Images, et projeté jeudi 4 avril au cinéma Omnia à Rouen avant une diffusion sur Arte. Les deux réalisateurs retracent la trajectoire de Claude Monet, Pierre-Auguste Renoir, Frédéric Bazille, Alfred Sisley, Edgar Degas, Paul Cézanne qui ont croisé Edouard Manet.
« Je connais l’impressionnisme pour l’avoir étudié à l’école, indique Julien Johan. J’étais davantage un adepte de Cézanne. Pendant notre travail, j’ai redécouvert les toiles de ces peintres, l’évolution de leur travail et de leur geste, les détails des peintures… J’ai apprécié notamment les œuvres de Degas. J’ai vraiment découvert son trait et j’ai été bluffé par son talent de dessinateur. C’est un talent émouvant ».
Le documentaire a demandé un an et demi de recherche, d’écriture et de préparation. Il a été nourri des correspondances des peintres, conservées au musée d’Orsay à Paris. « Nous avons effectué un long travail d’archivistes. Les scènes tournées sont racontées comme dans les lettres. Il y a certes un peu d’imagination en plus pour rendre le récit plus organique ».
Pour tourner le film, les deux réalisateurs sont venus chercher pendant trois semaines, en juin et juillet 2023, les lumières de la Normandie, celles à Yport et ses alentours. « Le ciel est très changeant. Il y a beaucoup de variations, se souvient Julien Johan. Je ne sais vraiment pas comment les peintres faisaient pour travailler ». Quant aux scènes intérieures, « nous avons voulu les raconter avec les lumières de l’époque. Des bougies permettent de s’en rapprocher ».
1874, la naissance de l’impressionnisme alternent des séances de travail en plein air, des échanges entre peintres, des images d’archives de cette fin du XIXe siècle pour reconstituer le parcours chaotique de ces artistes dans un contexte historique tragique. Il est question de lumière, de couleurs, de mouvement, de nature, aussi de doutes, de colère, de difficultés financières… « Nous connaissons le succès de Renoir, Monet… Mais nous ne soupçonnons pas les affres par lesquelles ils sont passés. Jamais ils ne sont tombés. Ils ont au contraire toujours rebondi », remarque Julien Johan. Les deux réalisateurs font de ces artistes des personnages romanesques, joyeux et surtout déterminés à imposer leur art.