Michel Bussi :  » Je crois que la BD permet cela : retirer le gras « 

photo : Philippe Quaisse

Quand un soldat américain risque sa vie pour une promesse de fortune… C’est le point de départ de Gravé dans le sable qui commence sur les plages sanglantes du Débarquement en 1944. Dans les histoires de gros sous, il y a toujours un moment où ça tourne mal. Quand Alice, la veuve de Lucky, veut connaître la vérité vingt ans plus tard, ça se complique sérieusement. Et, comme toujours avec Michel Bussi, le lecteur va se cogner aux murs, ceux qui se trouvent tout au bout des fausses pistes… Pour cette adaptation en bande dessinée, le récit est intact et prend bien le temps (124 pages) de ne pas bâcler le suspense. Ce qui aurait été fâcheux, avouons-le… Cédric Fernandez et Jérôme Derache s’attaquent ainsi aux écrits du deuxième auteur français le plus lu. Gravé dans le sable, initialement intitulé Omaha crimes, est publié chez Philéas. Entretien avec l’écrivain normand, Michel Bussi.

Vous devenez un habitué de la bande dessinée…

J’ai la chance d’être beaucoup sollicité par des maisons d’édition différentes. Cette fois, il s’agit de la nouvelle filiale d’Editis, Phileas, qui propose d’adapter des best-sellers.  Il se trouve que j’inaugure la collection avec Le Syndrome E de Franck Thilliez dont l’action commence aussi en Normandie (à Port-Jérôme et au SRPJ de Rouen – ndlr).

Quelques mots sur le roman Gravé dans le sable

C’était important pour moi parce que le Débarquement fait partie de ces événements qui ont marqué à jamais notre région mais dont on ne se souvient peut-être pas assez. Et puis, c’est très fort parce que, d’un côté, il y a ces soldats qui se font massacrer sur les plages et, d’un autre côté, il y a un symbole de libération et de liberté. La gravité et l’espoir. Pour moi, c’était un hommage que je voulais rendre.

Votre particpation est-elle forte dans cette nouvelle BD ?

Je suis fan de bande dessinée depuis toujours et je m’implique fortement dans les adaptations de mes romans. Je trouve que Gravé dans le sable a une dimension BD idéale. Pour un film, cela aurait été compliqué en termes de reconstitution. En BD, il n’y a pas de contraintes de budget et des possibilités infinies. Et quand j’ai écrit le roman, j’avais beaucoup d’images dans la tête.

Avez-vous ressenti une frustration en tant qu’auteur ?

Il n’y a pas eu de coupes importantes dans le récit. C’était assez simple finalement. Il a juste fallu retravailler les dialogues pour garder le plus percutant. Je crois que la BD permet cela : retirer le gras. Le plus difficile pour moi, cela aura été d’accepter les visages. Car si un romancier peut donner beaucoup de détails descriptifs, il n’en donne jamais assez pour fixer le visage d’un personnage. C’est peut-être moins vrai pour les personnages de Mrs Arlington ou d’Alice qui correspondent davantage à des archétypes simples. C’était beaucoup moins évident pour Nick, par exemple.

Le choix d’un dessin hyper-réaliste, c’était important ?

Les essais que j’avais vus étaient concluants. Le style réaliste marche bien pour recréer l’ambiance de la Normandie à la fin de la guerre et celle des Etats-Unis des années 1960. Le dessin est à la fois détaillé mais pas « dur ». Il y a même une pointe de nostalgie, je trouve… Cela permet de bien rentrer dans le récit.

Et pour la couverture, y avait-il plusieurs options ?

C’est toujours compliqué, je pense. On a longtemps tourné autour. Il fallait que l’on voit la guerre mais si on restait là-dessus, la confusion était entretenue car ce n’est pas du tout un récit de guerre. Il fallait que ce soit romantique aussi mais pas trop ; qu’il y ait la Normandie et les Etats-Unis… 

Vous êtes un fan de bandes dessinées. Où vont vos préférences ?

J’en ai beaucoup mais je crois que je placerais Jean Van Hamme tout en haut ; et notamment pour la série Thorgal, avec un art du scénario extraordinaire, une imagination remarquable… le Blueberry de Charlier et Giraud, aussi. Philémon (de Fred) et puis la Rubrique-à-brac de Gotlib. Franquin… Les pionniers.

Et toujours des projets pour vous…

Comme un avion sans elle sortira chez Dupuis (scénario de Fred Duval). L’adaptation de Ne lâche pas ma main suivra. Et j’ai aussi un projet de BD inédite…

Propos recueillis par Hervé Debruyne