David Oelhoffen adapte avec rigueur et intensité le roman de Sorj Chalandon, « Le Quatrième Mur », Prix Goncourt des Lycéens en 2013. Avec Laurent Lafitte, toujours juste. Le film est à voir dans les salles de cinéma dès ce mercredi 15 janvier.
David Oelhoffen a l’art et la manière de secouer le spectateur avec des films solides qui se penchent avec réalisme sur les conflits qui bousculent l’homme physiquement et mentalement, que ce soit des frangins dans Frères ennemis (2018), ou des militaires dans Les Derniers Hommes (2023). Après avoir adapté librement L’Hôte, une nouvelle d’Albert Camus pour Loin des hommes (2014), il s’empare du prix Goncourt des Lycéens de 2013 Le Quatrième Mur, un roman de Sorj Chalandon – journaliste au Canard enchainé – et signe aujourd’hui un film au titre éponyme qui nous transporte au Liban, en 1982.
Cette fois, le héros qui évolue encore en terrain miné, n’est ni un soldat ni un va-t-en guerre. Bien au contraire, c’est un artiste qui prend son courage à deux mains pour respecter la promesse faite à un ami mourant. Si Georges (Laurent Lafitte) se rend à Beyrouth, c’est pour y mettre en scène Antigone d’Anouilh avec des acteurs déjà recrutés et tous issus des différents camps politiques et religieux qui s’affrontent sur le terrain. Leur but : apporter un moment de paix au cœur d’un conflit fratricide. La question que se prose le spectateur c’est : ce projet humaniste va-t-il aboutir ?
Découverte d’une réalité
Laurent Lafitte est parfait en homme fragile, perdu dans une ville où il faut de multiples laissez-passer pour pénétrer dans les différents quartiers. La peur qui se lit sur son visage en dit long sur son courage, sa patience et sa détermination à aller à la rencontre de tous les protagonistes de la pièce, installés dans des territoires où il n’est pas toujours le bienvenu, auxquels son chauffeur et guide, Marwan (le solide Simon Abkarian), ne peut pas lui-même accéder. Ils échapperont à des tirs de snipers, seront mis en joue à de multiples reprises, refoulés parfois, puis acceptés plus tard. Le spectateur ressent l’oppression qui les habitent et tout comme Georges, ne comprend pas toujours les tenants et aboutissements du conflit qui semble ne jamais finir.
Alors que Georges découvre la réalité des combats à chaque coin de rue, Marwan lui demande : « Qu’est-ce que tu comprends à cette guerre ? » Il n’est pas certain que le spectateur comprenne mieux la situation géopolitique du Liban après avoir vu Le Quatrième mur, car si David Oelhoffen nous en fait parfaitement ressentir les conséquences, il s’intéresse d’avantage à l’art et à ses effets sur l’homme, sur le monde. Et la réponse rend modeste : si le conflit n’empêche pas la naissance d’un amour – Georges tombe amoureux de la magnifique Imane (la lumineuse Manal Issa), le théâtre, lui, n’arrêtera pas la guerre…
Le Quatrième Mur de David Oelhoffen (France, 1h56) avec Laurent Lafitte, Simon Abkarian, Manal Issa…