C’est avec un majeur levé bien haut contre l’intolérance, le machisme et pas mal d’autres sujets d’actualité que les furies punk de Lambrini Girls débarquent vendredi 21 mars au 106 à Rouen. Tout le monde en prendra pour son grade.
Avec Lambrini Girls, le politiquement correct et le langage soigné sont relégués au dernier rang de la classe. Ici les filles sont cash sur tous les sujets qui motivent leur discours : masculinisme, patriarcat, conflit israélo-palestinien, mondialisation, népotisme, problématiques féministes ou LGBTQ+, harcèlement de rue, etc. Elles considèrent que le monde ne tourne plus rond et l’expriment de manière radicale. Et l’actualité ne leur donne pas tord ! Leurs chansons, basées sur le parlé-chanté, transpirent cette colère chaude qu’elles externalisent par des textes bavards et acerbes, rageurs et effrontés. Les mots résonnent comme des grenades qui éclatent toutes les secondes et les cibles sont particulièrement bien visées. Le langage est cru mais très travaillé.
Les Lambrini Girls vocifèrent mais se montrent authentiques. Elles souhaitent être écoutées et ne se privent pas de choquer si nécessaire. Les plus bégueules n’ont qu’à rebrousser chemin. Pourtant, au milieu de ce foisonnant et irrévérencieux lexique, une certaine dose de pudeur s’affirme par l’utilisation de la troisième personne du singulier. Une façon de brouiller les pistes, histoire de ne pas se divulguer totalement : « je préfère chanter mes expériences personnelles comme si ce n’était pas les miennes », avoue Phoebe Lunny, l’autrice du groupe.
D’un point de vue musical comme dans les textes, les Lambrini Girls ne font pas dans la dentelle ou alors uniquement portée. L’énergie du punk est omniprésente même si le style Lambrini s’éloigne des « classic punk rock » du mouvement d’origine. Les chansons sont moins mélodiques, moins pop et s’inscrivent plutôt dans un registre noise — bruitiste et dissonant. Le genre du groupe est d’ailleurs généralement qualifié de noise-punk et souvent associé au mouvement « Riot-grrrl » qu’elles réfutent, préférant le provocateur et drôle « Stupid bitch music », une façon de casser l’image trop radicale qui émane de leur attitude sur scène. Le discours est toutefois sérieux et déterminé quand elles balancent sur les pervers, les misogynes, les sales types, les TERF – Trans-Exclusionary Radical Feminists (des féministes qui excluent les personnes transsexuelles de leur lutte), les racistes et autres intolérants spécimens.
Lambrini Girls s’est formé en 2018 à Brighton. Au départ quatuor, le groupe est aujourd’hui constitué de Phoebe Lunny à la guitare et au chant, anciennement bassiste et choriste, et de Lilly Macieira-Bosgelmez à la basse. Une batterie complète l’instrumentarium sur scène, endroit qu’elles privilégient pour diffuser leurs messages, pour éduquer les gens, pour faire évoluer les mentalités même si le récent album Who Let The Dogs Out y a largement contribué en se classant à la seizième place des charts au Royaume-Uni.
Les Lambrini Girls enchaînent les concerts où Phoebe peut à tout moment descendre de scène pour interloquer le public, l’impliquer dans ses combats, le remuer voire l’insulter… Cette femme au tempérament bien trempé dézingue les codes machistes du musicien en se déshabillant sur scène et pouvant jouer en culotte et soutien-gorge ou même torse-nu comme n’importe quel artiste masculin peut le faire sans que cela ne pose de problème. Elle souhaite que les femmes soient enfin prises au sérieux dans la musique, qu’elles soient simplement libres de faire et d’agir comme elles l’entendent. Les mentalités évoluent doucement mais le combat, entamé il y a déjà plusieurs décennies, semble encore long jusqu’à la réelle égalité. Les Lambrini Girls n’ont pas terminé leur chemin de croix mais chaque concert est une bataille gagnée.
Infos pratiques
- Vendredi 21 mars à 20 heures au 106 à Rouen
- Tarifs : de 19 à 4 €
- Réservation au 02 32 10 88 60 ou sur www.le106.com
- Aller au concert en transport en commun avec le réseau Astuce
