Daniel Isoir révèle toute la mélancolie de César Franck

Photo : Nicolas Dal Maso

C’est un compositeur qui l’accompagne régulièrement depuis son enfance. Le pianiste et pianofortiste Daniel Isoir, fondateur de La Petite Symphonie, revient à César Franck (1822-1890) avec ce nouvel album Triptyques, enregistré sur un Érard de 1873 au théâtre du château à Eu. C’est très beau !

« Quand j’enregistre un disque, je choisis des musiques que je connais bien et que je peux défendre. Il n’est pas possible de jouer une partition foncièrement de manière différente. Il faut une cohérence. Lors d’un concert, on peut se laisser emporter par l’enthousiasme. Pas sur un enregistrement qui sera écouté une fois, deux fois… Personne ne doit entendre les ficelles de l’artiste. Pour cela, un disque demande une plus grande maturation ». 

Daniel Isoir a beaucoup interprété les partitions de César Franck. Il les a aussi beaucoup entendues dès son enfance lorsque son père, André Isoir, organiste, les jouait sur l’instrument familial et préparait un enregistrement de l’œuvre du compositeur. « Franck est un musicien qui s’est découvert très tard des talents de compositeur. Il a écrit des pièces virtuoses pendant sa jeunesse pour épater la galerie. Puis, il a composé, dans les dix dernières années de sa vie ses plus grands chefs-d’œuvre qui sont des monuments d’histoire de la musique. C’est assez sensuel avec des enchainements harmoniques rares et riches ».

Comme une évidence

Pour ce disque, Daniel Isoir a choisi trois triptyques, le Prélude, Choral et Fugue en si mineur de 1884, le Prélude, Aria et Final en mi majeur de 1887 et le Prélude, Fugue et Variation en si mineur de 1860-1862. Ce sont trois pièces d’une profonde mélancolie avec des instants sombres et d’autres empreints de sérénité. Ces musiques presque symphoniques comportent « trois mouvements très imbriqués. Avec ces formes cycliques, tout doit être très cohérent. Franck peut développer un thème dans le premier mouvement et le faire réapparaître dans le troisième ». Le pianiste y ajoute le 3e Choral pour grand orgue en la mineur, datant de 1890, transcrit pour piano par Blanche Selva, une œuvre puissante, et la Danse lente de 1885, très charmante.

Daniel Isoir est chez César Franck comme chez lui. Il y a une évidence dans son interprétation qui offre de jolis moments d’introspection et de plénitude. Cet enregistrement fut néanmoins « très sportif ». Daniel Isoir a installé entre le 18 et 21 février 2019 un piano Érard de 1873, restauré par Nicolas Dumas et accordé par Daniel Gouel, au théâtre du château à Eu, un « endroit inspirant ». « À la fin de la journée, j’avais des courbatures. La musique de Franck est presque athlétique. Il y a des nuances assez extrêmes. Il faut faire ressortir plein de plans sonores — ce qui est très excitant à jouer — et accepter qu’il y ait une certaine agressivité dans le son. Parfois, on atteint une certaine explosion. Comme dans le 3e Choral où il y a des notes partout ». L’album Triptyques est sorti en mars 2021.

Infos pratiques

  • Triptyques – Œuvres pour piano de César Franck par Daniel Isoir, Muso