22 ans d’enseignement au conservatoire de Rouen

Maurice Attias, professeur d’art dramatique, quitte le conservatoire de Rouen après avoir accompagné la classe d’orientation professionnelle pendant 22 ans. C’est Caroline Lavoinne qui lui succède.

Désormais, il pourra « lire et voir inutile ». Juste pour le plaisir ! Maurice Attias quitte son poste de professeur d’art dramatique de la classe d’orientation professionnelle au conservatoire de Rouen. Pendant 22 ans, ce metteur en scène exigeant, affable, sans concession, a accompagné environ 200 apprentis comédiennes et comédiens dont Caroline Lavoinne qui lui succède, Clémence Ardouin, Bruno Bayeux, Yann Dacosta, Radouane Leflahi, Laura Chapoux, Destin Destinée Mbikulu, Emmanuel Noblet, récompensé par un Molière pour Réparer Les Vivants, Andréas Goupil… Il les a accompagnés pendant trois années avec cinq ou six auteurs et autrices majeurs et leur a proposé une rencontre avec une quinzaine d’acteurs et actrices professionnels.

Élève à Reims, Maurice Attias a toujours préféré « prendre les choses en main. L’acteur dépend du désir d’un autre. C’est un peu orgueilleux mais j’y ai trouvé mon compte ». Il signe plusieurs mises en scène de pièces de théâtre dont Amarcord Fellini avec une troupe d’une centaine d’artistes, Horace de Corneille, Le Malentendu de Camus…

22 ans au conservatoire de Rouen en ayant en tête cette phrase : il ne s’agit pas de t’enseigner mais de t’incendier. « Il y a un travail monumental à effectuer ». Le premier : faire en sorte que « le corps soit détendu. Tous sont à la fois des marionnettes et des marionnettistes. On ne doit pas rougir de ce que l’on fait ». Il y a ensuite le texte. Et « le texte, c’est le rôle. La notion de personnage n’existe pas. Un rôle, c’est de l’encre sur du papier qu’il faut déchiffrer, comprendre. La compréhension est autant importante que la ponctuation. Il est indispensable de mener une enquête sur le texte afin de pouvoir se mettre dans tous les états possibles, avoir cette invention, être autonome devant un metteur en scène. Pour oser faire cela, il faut que le regard en face ne soit pas aimant mais attentif et bienveillant. Je leur dis souvent : je suis votre premier spectateur et aussi le pire ».

« Le théâtre est possible quand tout le monde est là »

Pour enflammer les élèves, il est essentiel de leur offrir un plateau, « créer les conditions au plus près de la situation professionnelle, faire comme s’ils étaient dans le métier ». Réussir un travail en commun suppose une véritable cohésion dans un groupe. « On ne peut rien faire sans la confiance des autres ». Cela passe par « savoir son texte » et « arriver à l’heure ». Tout le reste, « c’est du baratin. Le théâtre est possible quand tout le monde est là ».

Deux fois, au milieu et en fin d’année, la classe d’art dramatique du conservatoire de Rouen se retrouve dans un théâtre pour jouer, chanter, danser. Un vrai spectacle pour travailler sur un auteur, un texte ou une thématique mis en scène par Maurice Attias. Les apprentis répètent et organisent la résidence en toute autonomie. À la fin, il y a la confrontation au public et à un jury professionnel.

Ce sont deux moments importants pour « ne pas être dans l’illusion d’être comédien ». Maurice Attias le répète : « le métier est génial. C’est la formation à la vie. Le théâtre fait appel au corps, au ventre, à la politique, à l’histoire, à la littérature… Il y a l’idée d’agir sur le monde ». Mais pas question de se laisser bercer par des chimères. « Le métier est dur. Il faut résister ». Et la récompense arrive à la fin des représentations. « Quand ils sont applaudit, ils savent ce que leur a coûté cet engagement. Ils ne sont pas dupes ».

Un seul regret cependant : Maurice Attias aurait souhaité ouvrir un pôle d’enseignement artistique supérieur en Normandie. Un projet qui reste en suspens.